Confiné et chômeur, je navigue entre banalité confondante et voyages intérieurs, en silence ou avec FIP ou France Musique. J'ouvre Sempé, 100 dessins pour la liberté de la presse paru en juin 2019, j'admire ses dessins de foules ou de solitudes, ses personnages à bicyclette ou cet homme qui promène son chien sur le Pont des Arts. J'aime l'élégance, la mélancolie, l'innocence dans les dessins de Sempé.
Jetant un regard rêveur sur ce promeneur solitaire, mains dans les poches, je me suis souvenu de ce texte écrit un jour de marché, rue Daguerre, à Paris - la ville doit être bien singulière ces temps-ci.
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Les ravioles à trottinette sur un air d'orgue de Barbarie À la Maison de la Pâte rue Daguerre, les ravioles enfarinées contemplent la file de clients. La baguette droite comme un i s'est vue grignoter le quignon par un couple endimanché. Dépassant du sac à dos du badaud, la botte de poireaux prend l'air de midi trente. La trottinette verte emporte la fillette aux collants mauves ornés de papillons. Une jeune femme se dandine une banane à la main. Tirant sur sa laisse bleue, le bouledogue français promène son maître. Et les dames à l'orgue de Barbarie chantent La Ballade des Gens heureux*.
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* La Ballade des Gens heureux, chanson composée et interprétée par Gérard Lenorman, sur des paroles de Pierre Delanoë (1975)
Le journal de bord dans sa continuité → Journal tendre d'un confiné