Cela étant le film est particulier puisque la plupart des scènes se déroulent au cours de l'année 1968 et font revivre la série de concerts donnés par l'actrice et chanteuse, quelques mois avant son décès...
Elle traverse alors une très mauvaise passe, tant personnelle que professionnelle, et elle a été contrainte de quitter les Etats-Unis pour Londres afin de gagner l'argent pour subvenir aux besoins de ses enfants. Elle fait le constat terrible : Je dois quitter mes enfants pour avoir de quoi vivre avec mes enfants.
Judy accepte donc, pour une somme d’argent conséquente, de se produire pendant cinq semaines au Talk of the Town, un cabaret très à la mode tenu par le célèbre impresario Bernard Delfont, où très vite elle jouera à guichets fermés.
On voit une femme hantée par une enfance sacrifiée dès l'âge de deux ans pour Hollywood, qui aspire à rentrer chez elle pour consacrer du temps à ses enfants et dont le retour est sans cesse contrarié. Et on est admiratif de son courage pour aller toujours de l'avant et des efforts insensés qu'elle déploie pour récupérer ses enfants. Une des conversations qu'elle a avec sa fille, et au cours de laquelle celle-ci lui exprime clairement qu’elle a davantage besoin de calme que de la voir est extrêmement émouvante. Surtout lorsque Judy lui jure que ça ira très bien.
Il est manifeste que l'actrice a aussi du se transformer physiquement, par un maquillage adapté, le port de lentilles de contact gris foncé et changer de coiffure. Le résultat est exceptionnel. Je crois que la comédienne a l’âge du rôle. Et pourtant comment s'étonner qu'elle meurt six mois plus tard ? On jurerait -tant elle est exténuée- que le personnage que l'on voit à l’écran a 20 ans de plus, tout en étant magnifique et semblant conserver le caractère d'une éternelle adolescente, fantasque et parfois capricieuse, mais toujours séductrice.
Et puis à d'autres moments elle devient ultra touchante et fragile, par exemple dans la scène d'adieu avec son assistante londonienne lorsqu'elle est attablée devant une pâtisserie (pas d'au-revoir sans gâteau à Londres !) qu'on dirait être la première de toute sa vie. Here's to you ! À votre santé lui souhaite-t-on alors.
Rien d'étonnant à ce qu'elle soit devenue toxicomane et que sa santé ait lâché. Le conseil du médecin anglais la priant de prendre mieux soin d'elle est totalement irréaliste. Elle est d'ailleurs autant dépendante de la chimie que de la scène qui l'attire comme un aimant. Elle paiera de sa vie l'immense succès du Magicien d'Oz (qui lui valut l'Oscar spécial de la "meilleure jeune actrice" en 1940) après une trentaine d'années d'applaudissements et de larmes. Une vie dont personne ne rêverait.
Renée Zellweger a reçu l'oscar de la meilleure actrice pour cette prestation, face à Cynthia Erivo (Harriet), Scarlett Johansson (Marriage Story), Saoirse Ronan (Les Filles du docteur March) et Charlize Theron (Scandale). A noter que la comédienne avait eu, en 2003, l'oscar du meilleur second rôle féminin pour Retour à Cold Mountain.Rupert Goold réalise ici son second film pour le cinéma après le thriller True Story, qui lui aussi prend racine dans des faits réels. A noter qu'on lui doit également King Charles III, un téléfilm consacré au célèbre roi d'Angleterre.