Magazine Culture
4-Une
furieuse envie, même.
J'avais dit trois mais en
fait c'est quatre, bien que le quatre ne soit qu'une extension du
trois dans le cas présent, comme un addendum, c'eût pu être
trois et demi mais ça faisait pas un compte rond, j'aime ce qui est
carré, et le quatre est la représentation typique du carré.
À
moins que ce ne soit le deux.
Ou d'autres encore.
Mais on n'est pas
là pour faire une fixette sur les représentations typiques, sinon
on va passer pour des maniaques, la représentation typique des gens
qui ont des névroses obsessionnelles.
Moi j'ai pas ce problème.
Une furieuse envie de me
familiariser, aussi, il faut bien le reconnaître même si cela nous
coûte, avec le logiciel Open office, le traitement de texte libre
qu'on peut télécharger gratuitement autant qu'on veut comme un
malade.
Moi j'en ai vingt-six versions, toutes la même.
Des versions
de secours.
Sur mon disque dur, en cas de plantage.
Comme ça s'il se crashe un jour, mon disque dur, je saurai que
j'avais plein de versions de secours.
C'est apaisant, je trouve.
Se familiariser donc, pour
faire des mots, des phrases, des paquets de mots et de phrases, qui
puissent représenter à un instant T ce qu'on veut représenter en
écrivant à ce même instant.
J'ai jamais compris pourquoi
on ne disait pas l'instant I, comme on dit l'heure H, le moment M, le
jour J (pour jeudi), le plat P à gratin G, le rayon R.
Je n'ai pas
plus compris pourquoi on disait le rayon X, la bombe H ou le point G.
Alors qu'il y a les magasins Point P, pourtant.
On devrait dire, en
toute logique, le xayon X, la hombe H ou le goint G.
Mystère.
Ou
alors quelque chose m'échappe.
Mais on s'en fout.
Se familiariser donc, pour
faire des mots, sur plein de pages.
Parce qu'au début de ma pratique
du traitement de texte, je dois bien l'avouer, sot comme je suis,
n'ayant pas eu le plaisir d'inventer la poudre, j'appuyais toujours
sur la même touche, il ne me venait pas instantanément à l'idée
de changer parfois de touche.
Alors c'était facile, ça faisait
comme ça:
ppppppppppppppppppppppppppp,
ppppppppppppppppppppppppp ppppppppppppp
ppppppppppppppppppppppppppppppp pppppppp
ppppppppppppppppppppppp.
Ou:
UUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUU UUUUUUUUU;
UUUUUUUUUUUUU.
Mais
de l'avis de ceux qui ont lu mes premiers livres, des gens en qui
j'avais toute confiance, qui étaient avisés et qui avaient déjà
lu des livres auparavant, on s'ennuyait vite.
Et ferme.
Pire,
on s'endormait même, quand je faisais des:
ZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZ.
Jusqu'à
ce que je comprenne qu'on pouvait changer de touches et faire des
trucs moins jolis mais plus compréhensibles, pour le lecteur.
Où
l'on perd en créativité et en expression artistique, on gagne en
lisibilité et en compréhension, c'est vrai.
Faut faire le choix,
c'est tout.
Faut savoir qu'est-ce qu'on veut.
Soit on est artiste, soit on
est compris.
On ne peut pas être les deux.
D'ailleurs, un artiste
qui pleure tout le temps en disant qu'il est incompris, c'est qu'il
est donc un bon artiste, bien formaté, bien dans le moule d'artiste,
et ça on le comprend.
C'est donc un artiste incompris qu'on
comprend.
À
l'inverse, un artiste qui pleure tout le temps en disant qu'il est
compris, là on comprend pas.
Ce n'est pas un bon artiste, et on ne
s'étendra pas sur lui, on ne va pas en plus lui faire de la
publicité.
À suivre...