Magazine

Ouvrez, ouvrez la cage aux oiseaux

Publié le 26 mars 2020 par Desfraises

Ouvrez, ouvrez la cage aux oiseaux

Comme le tournesol qui suit, imperturbable, la course du soleil, je me poste côté jardin le matin puis côté rue l'après-midi. Il est dix heures et j'observe, depuis l'ombre, le soleil qui baigne les baies vitrées de l'immeuble en face. 1, 2, 3, 4e étage, une dame sirote son café, elle alterne entre les touches de son clavier d'ordinateur et la cigarette qui patiente sur une soucoupe. Un grillage tendu de gauche à droite et de haut en bas empêche les pigeons d'aller souiller son balcon. C'est du moins, j'imagine, la raison d'être du grillage. Une perruche passe devant elle et ricane. Qui de la dame ou de l'oiseau est en cage pour une fois ?

C'est côté rue que je jauge la file d'attente à la supérette d'en bas, que je contemple le bout de mer qu'il m'est donné de voir, l'Estaque, les viaducs que je devine, un bateau de croisière à quai, en carafe.

À droite de la dame confinée derrière les mailles de son grillage, l'appartement mitoyen a cloisonné son balcon de baies vitrées, une jeune femme y fait un brin de ménage, point de rideau pour cacher sa tenue, un t-shirt ample, une culotte fuschia. À droite encore, le monsieur en robe de chambre chocolat porte à son tour ses lèvres à son café. Ses étendoirs sont vides de linge, pas une plante pas une fantaisie. Il a peut-être réservé sa main verte à la façade côté mer qui m'est cachée, qui sait. Au-dessus de lui, une dame blonde au pull rouge à pois blancs se démanche le cou pour distinguer l'hélicoptère qui vrombit au loin.

Les absents au balcon dorment encore, télé-travaillent, étudient à distance ou s'emploient là où ils doivent, là où ils peuvent.

De mon côté, rue ou jardin, je lis, j'écris, je réfléchis, je joue avec Louise, 10 ans, qui me propose à l'instant et à 600 kilomètres de distance à vol d'oiseau une partie de bataille navale. Touché, coulé.


-----
Note : Le titre du billet fait référence à la chanson de Pierre Perret ( lien)
Le journal de bord dans sa continuité → Journal tendre d'un confiné


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Desfraises 1925 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte