#2020RacontePasTaVie - jour 81, l'album du samedi : Le Pari des bretelles de Félicien Brut, Edouard Macarez et le Quatuor Hermès

Publié le 21 mars 2020 par Aymeric


Je ne sais plus si je vous en ai déjà parlé mais la musique occupe quelque place dans ma vie. A l'intérieur de cette place trônent en majesté une cinquantaine d'albums. Et parmi ceux-ci, Le Pari des bretelles de Félicien Brut, Edouard Macarez et le Quatuor Hermès.

Voilà un disque qui n’est pas là depuis bien longtemps. Quant à savoir s’il trônera longtemps, c’est incertain mais mon enthousiasme du moment me souffle que oui.
C’est curieux parce le Félicien Brut cité et plus ou moins leader sur ce disque est un accordéoniste et que longtemps j’ai eu l’accordéon en horreur.
Il m’évoquait Yvette Horner, André Verchuren, figures alors à mes yeux ringardes au possible et renvoyant à un univers que je pouvais côtoyer à l’occasion et dont je voulais à tout prix me détacher, me distinguer.

Les années passant et la culture musicale s’accumulant j’ai peu à peu dépassé cette aversion première.
En passant par le cousin de l’accordéon, le bandonéon.
(Quelqu’un m’a fait remarquer qu’insister sur le lien de famille entre les deux instruments ne serait pas possible en Argentine et aurait fait de moi là-bas, un Argentin mort.)
J’ai d’abord su apprécier les beautés des disques de Dino Saluzzi avant de plonger dans les merveilles d’Astor Piazzolla puis plus récemment, de faire mon miel des créations de Tristan Macé.

Et puis la musique Klezmer où l’accordéon lui-même se trouve parfois a achevé le travail de sape pour qu’enfin cessent toutes mes réticences.
(Au point que j’emprunte, numérise, et écoute aujourd’hui plus souvent qu’à mon tour deux compilations de chez Frémeaux et associés consacrée à l’instrument.)

Ma mue était donc déjà faite lorsqu’en 2018, alors que j’avais depuis peu de temps quitté les matinales de France Culture pour celles de France Musique – meilleures pour mon moral trop perméable aux aspects anxiogènes de l’actualité – le disque de Félicien Brut, Edouard Macarez et le Quatuor Hermès fut présenté et même maintes fois mis en avant par la station de radio.

Je me souviens qu’à cette époque Saskia De Ville présentait la matinale et que dans le courrier des lecteurs une auditrice nommée Saskia – une autre, donc – accordéoniste d’une dizaine d’années, demandait davantage d’accordéon à l’antenne.
Ce disque tombait à point nommé.
Les extraits proposés, de même que l’interview de Félicien Brut, m’ont, tout non-accordéoniste que je suis, séduit au point d’y aller de mon achat.

Et bien m’en prit.
Les versions de Gershwin, d’Astor Piazolla – compositeurs chéris – et de l’Ouverture sur des thèmes juifs de Prokofiev y sont d’une qualité à faire tomber les cuirasses puis les larmes.

La suite musette, composée par Thibault Perrine, elle, m’a même ému au plus profond.
J’y ai trouvé un travail extrêmement fin, qui fait se marier une écriture contemporaine suffisamment au fait des innovations et écoles des années passées pour ne se sentir obligée par aucune, avec la reprise de thème de bals traditionnels sans que rien ne semble hors de propos, jamais.
Et j’y ai reconnu quelques vieux airs qu’aimait écouter mon grand-père autrefois, lorsque je le surprenais chantonnant sur ses bandes de bals musette, certains matins de vacances passés en sa compagnie, occasion d’émotions remuantes au sourire un peu triste devant le temps passé.
Souvenirs d’un monde dont je ne cherche plus à me détacher, me distinguer et qui au contraire m’est devenu cher.

De la nostalgie qui m’étreint alors j’ai bien des anecdotes dont je pourrais vous faire profiter, dont je vous ferai profiter sans doute, mais pas dans l’immédiat car, comme vous le savez, le temps presse et votre patience s’use.