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Maintenant,
pour varier les plaisirs autant que pour terminer cette limpide
démonstration , faisons avancer l'homme grand vers nous, et faisons
reculer l'homme petit jusqu'à ce qu'il devienne ridiculement petit,
je veux dire il est déjà bien assez ridicule comme ça on l'a bien
vu et ça nous a bien fait rire, mais faisons-le rapetisser encore,
envoyons-le au loin, pour finaliser notre magistral postulat.
La nature
va-t-elle changer son fusil d'épaule?
Non, car la nature n'a pas de
fusil.
Et si un jour la nature avait un fusil, elle n'a pas d'épaule
non plus. De toutes façons.
Comme ça c'est réglé.
Elle va donc continuer à faire
chier le petit, suivant la même loi énoncée précédemment, et en
plus nous on l'a fait chier aussi le petit, en l'envoyant promener, y
a pas de raison que la nature soit la seule à s'amuser, nous on a le
droit aussi, ça détend après tout.
Et il vaut toujours mieux
profiter des faibles que de s'attaquer aux forts, il y a des lois
qu'il faut respecter.
Considérons
donc une fois pour toutes – et après on ira se coucher - que les
petits sont plus faciles à faire chier que les grands.
Chacun l'aura
constaté s'il a un enfant.
Il est infiniment plus aisé, par
exemple, de traîner son enfant sur 500 mètres attaché au
pare-chocs arrière de la voiture s'il a trois ou quatre ans.
Arrivé
à trente ans et pesant 110 kilos si c'est une nature forte, ce sera
une autre paire de manches. L'enfant de trente ans ruera plus
facilement dans les brancards, brancards qui devront être d'autant
plus solides que notre gaillard pèse maintenant ses bons 110 kilos.
Pour traîner donc son enfant sur la route en toute décontraction, on
prendra des brancards qui la tiennent, et dans lesquels l'enfant -
maintenant épanoui - de 110 kilos pourra ruer à son aise.
On ne
choisira pas par contre les civières.
On ne rue pas dans les
civières, et quand bien même, à la force du poignet et au terme
d'un très long entraînement, on arrivait à y ruer, on y ruerait
très mal, de manière pataude, balourde, la civière n'étant pas
configurée idéalement pour une ruade élégante et souple, et le
résultat serait très inesthétique pour les badauds qui viendraient
à passer par là au moment de vos exploits, qui y perdraient du coup
tout leur intérêt.
S'il y en a un.
Je garantis rien.
La
vie des grands hommes n'est pas aisée, disais-je donc.
On
le verra plus loin.
Ou
pas, on peut mourir demain.
Bon
en fait, voyons-le tout de suite, comme ça on sera débarrassés, et
on pourra soit mourir, soit aller manger.
La
vie des grands hommes n'est pas aisée, à bien des égards.
Cela ne
relève pas que d'une question financière, un grand homme issu d'une
famille aisée n'aura pas obligatoirement une vie aisée, même si
l'aisance financière permet de manger des pains au chocolat le matin
au petit déjeuner avec du lait entier à capsule rouge et des
tartines de pain bio du jour si on a encore faim, et ce contrairement
aux grands hommes issus de milieux défavorisés, qui mangent des
biscottes sèches dans du lait écrémé à capsule verte, et des
croûtons de la veille s'ils ont encore faim.
Voilà
une chose que je n'ai jamais comprise.
Les pauvres ont toujours faim,
alors que les riches n'ont jamais faim.
Un riche qui a plein d'argent
dans son porte-monnaie de cuir de vachette devrait
avoir
faim, étant donné que son argent lui permet d'acquérir maintes
victuailles; son esprit, sachant qu'il peut acheter du saucisson gras
et de la crème fraîche épaisse, devrait commander à son estomac
d'avoir faim.
Ce serait une relation de cause à effet tout à fait
normale et envisageable.
Pour les pauvres, le fait de n'avoir aucune
piécette dans son porte-monnaie en skaï lui permettant d'acheter
maintes victuailles lui aussi; son esprit, sachant qu'il ne peut
acheter du lard maigre et du fromage blanc à 0%, devrait commander à
son estomac de n'avoir pas faim du tout, et lui couper l'appétit
tout net.
Ce serait bien pratique, je ne comprends pas que les
pauvres n'aient pas ce réflexe rudimentaire de ne pas avoir
d'appétit.
Ils ont toutes les raisons de ne pas avoir d'appétit, et
ils ont faim.
J'ignore si des études sérieuses ont été menées
sur ce sujet, mais je pense que c'est le genre de chose qui nuit à
leur image, qui remet en cause leur statut, et qui est propre à
décourager tous les jeunes qui voudraient devenir comme eux, je
trouve que c'est contre-productif au possible.
Mais bon, gardons-nous
de juger, de peur que nous soyons jugés à notre tour. Oui mais
enfin bon quand même.
À suivre...