Seule la femme qui gratte le sol semble totalement étrangère à la folie des gens, exposition de Sarah Trouche

Le titre de cette exposition de Sarah Trouche est tiré d’un livre d’Andreï Makine, L’amour humain. Pour autant, l’exposition n’illustre pas ce roman. La phrase, extraite pour devenir titre, est comme cette terre creusée, modelée, transformée par l’artiste (« qui gratte ») et offerte au regard « des gens ». Cela est particulièrement sensible, à mon sens, dans le film documentaire, Les protagonistes, où nous voyons des artistes danser dans la nature, les champs de colza, au milieu de bâtiments industriels et de carrières d’argile du Provinois (77), et croisant des randonneurs. Il y a là une belle réflexion sur l’art, la création, la performance. 

 

Tous ces mouvements seraient figés dans les autres oeuvres exposées si ne tournaient pas au centre de la première salle des miroirs couleur cuivre. Ce ne sont pas Les échappés qui bougent puisqu’ils sont pris dans le drapé de cuir qui arrête les gestes ; ce sont bien les miroirs nous renvoyant notre image, celles des autres visiteurs et celles des oeuvres accrochées aux murs. Ce n’est d’ailleurs pas uniquement les oeuvres et les visiteurs que ces miroirs piègent et libèrent à la fois, c’est la lumière elle-même. Sarah Trouche le confirme dans la salle où elle expose deux photographies de performance sur lesquelles elle tient devant elle un miroir qui réfléchit le soleil tandis que, dans le ciel, luit l’astre de la nuit. 

Ainsi, bien que nous entrions dans cette exposition par la terre, sur laquelle on marche, que des ongles grattent, que des machines excavent, nos regards sont vite captés par la lumière et par l’horizon dont la ligne passe par le nombril du corps, comme si l'artiste redéfinissait l'Homme de Vitruve, dessiné en son temps par Léonard de Vinci.

J'ai vu cette exposition au Centre d'art contemporain La Traverse d'Alfortville (94), exposition interrompue avant le 28 mars dans le cadre des mesures de confinement appliquées dans le pays.