Le terne Samuel Schmid a
été réélu brillamment conseiller fédéral le 12 décembre 2007 par des membres de tous les partis et par ceux de l'UDC. Il faisait alors l'unanimité pour lui. Il ne faisait pas trop de bruit et
on ne lui en demandait pas plus. Qualifié il n'y a guère de demi-conseiller fédéral par son ex-parti, l'UDC, comme un rat pense quitter un navire en perdition, il a décidé de
quitter ce dernier et ne représente plus que lui-même, ce qui n'est pas grand chose, voire zéro.
Du coup la belle unanimité, cimentant des intérêts contraires, s'est effritée. Quand Samuel Schmid a répondu, après beaucoup d'atermoiements, aux sirènes de la trahison en
rejoignant le Parti Bourgeois Démocrate, créé dans son canton de Berne, et dans celui des Grisons, celui d'Eveline Widmer-Schlumpf, il a encore récolté quelques applaudissements du côté
des adversaires de l'UDC, trop contents qu'il favorise les divisions de cette dernière. Mais c'était seulement pour faire la nique à l'UDC. Le coeur n'y était plus
vraiment.
Entre parenthèses, le Parti Bourgeois Démocrate, parti dissident de l'UDC, a la particularité d'avoir deux conseillers fédéraux sur sept au gouvernement, sans exister
juridiquement. Quand ce parti sera réellement constitué, il n'aura pas beaucoup plus d'élus au parlement qu'au conseil fédéral, ce qui est assez croustillant, et on ignore encore
combien d'électeurs il pourra bien avoir dans l'avenir, s'il a d'ailleurs un avenir. Paradoxalement, dans le même temps, l'UDC, qui reste le plus grand parti de Suisse, est rejeté dans
l'opposition et n'est plus du tout représenté...
C'est donc à son corps défendant que le ministre de la Défense se retrouve sous les projecteurs, dans un bien mauvais rôle, celui qui n'a fait que des mauvais pas au cours de ces derniers
mois, mauvais pas que Fabian Muhieddine a la cruauté de répertorier dans Le Matin du 16 juillet 2008 (ici) : les drames de la Jungfrau et de la Kander, six et cinq morts; le financement avorté du livre sur
l'ancien chef de l'armée, Christophe Keckeis; le meurtre de la jeune Francesca par un soldat; la polémique sur la garde avec des armes chargées; enfin la nomination du nouveau chef de
l'armée, Roland Nef. Dans aucun de ces cas Samuel Schmid n'a montré qu'il était à la hauteur de ses responsabilités et en mesure de surmonter des crises.
Tous les adversaires patentés de l'armée sont bien sûr au rendez-vous pour souligner les défauts de la cuirasse de cette dernière. S'ils chargent le bateau, malheureusement les reproches
adressés sont en grande partie justifiés. Seulement le responsable en premier de ces charges contre l'armée en est le chef du Département fédéral de la défense, de la
protection de la population et des sports, un certain Samuel Schmid. Aussi bien ne sont-ce plus seulement les adversaires de l'armée mais ceux qui la défendent qui maintenant montent à
l'assaut contre lui.
Dans sa chronique de L'Hebdo (ici) daté du 17 juillet, Charles Poncet, écrit, s'adressant à Samuel Schmid : "En huit ans, vous avez
anéanti l'armée suisse avec une efficience que le Groupement pour une suisse sans armée, n'aurait jamais pu approcher". Comment se fait-il, si les résultats du ministre sont si mauvais, qu'il
ait été réélu deux fois à ce poste ? C'est reconnaître implicitement que l'inaction et la lenteur d'exécution sont des vertus aux yeux des parlementaires et des partis...
A contrario Christoph Blocher en avait trop fait et trop rapidement pour être réélu. Ses qualités dérangeaient. Il avait une personnalité trop grande, ce qui, voyez-vous, est rédhibitoire pour
faire partie du saint des saints. Les parlementaires, au contraire de Dieu, préfèrent les tièdes et ne veulent pas qu'une tête dépasse et fasse de l'ombre aux autres. A ce point de vue Samuel
Schmid était idéal. Les conséquences pour l'armée le sont moins. On le découvre tout d'un coup aujourd'hui, mais un peu tard.
Charles Poncet conclut, toujours à l'adresse de Samuel Schmid : "Il vous reste une solution rédemptrice: partir". Philippe Barraud sur son site Commentaires.com (ici) arrive à la même conclusion, mais il ajoute que Roland Nef doit faire de même, parce qu'il est affaibli et vulnérable. La révélation des
harcèlements qu'il a fait subir à son ex-compagne et qui lui a valu d'être poursuivi pénalement par elle au moment de sa nomination "suffit à jeter un doute sur ses capacités à maîtriser
ses émotions et donc, à conduire sereinement une institution rongée par le doute".
C'est le chiffre zéro qui revient sous la plume de ces deux commentateurs. Charles Poncet ironise : "En fait de "risque zéro", Caporetto, juin 1940 ou Pearl Harbor furent moins calamiteux
qu'un chef de votre acabit". Philippe Barraud écrit de son côté à propos du ministre de la Défense : "Non seulement il n'est plus crédible, mais il n'a pas de groupe politique derrière
lui. Schmid, combien de divisions ? Zéro ! Un chef de l'armée sans troupes, à quoi cela ressemble-t-til ?".
Hier, lors de sa conférence de presse, Samuel Schmid a expliqué qu'il ne savait rien sur les tenants et les aboutissants de l'affaire Nef, qui, selon lui, relevait strictement de la sphère privée.
En somme il a répondu : zéro pour la question ! Il semble donc bien que zéro soit devenu le chiffre fétiche, sinon emblématique, de Samuel Schmid.
Bien que je n'aime pas tiré sur une ambulance, je ne peux que constater une chose : SAMUEL SCHMID est pathétique quand il se cramponne aux mêmes branches pourries que son
protégé, Roland Nef. Il est bien devenu LE CONSEILLER FEDERAL ZERO.
Francis Richard