Petit essai étonnant. En quelques pages enlevées Régis Debray replace notre époque dans l'histoire.
Ce qui marque notre temps, c'est le souci, absolu, de l'écologie. Sauvons la planète. C'est une "correction". C'est une réaction au "tout esprit", règne absolu de la technologie, négation de la nature, qui l'a précédé, et qui, d'ailleurs, a été illustré par les avant gardes artistiques du début du siècle dernier.
Ce "tout nature" paraît un rien ridicule, un peu terne, voire infantile, mais, surtout, pas dangereux. C'est là son véritable danger. Car, à le regarder de près, ses procédés sont ceux de "l'opium du peuple", la religion moyen d'asservissement. Il a, aussi, les caractéristiques des "absolus" qui ont ravagé, les uns après les autres, la planète. Le "tout nature" serait-il un fondamentalisme, un fanatisme, nous conduisant tout droit à une "dérive autoritaire" ? L'écologiste comme possédé, façon Dostoievski ?
Comme chez Aristote, la vertu consiste à prendre le "milieu" entre deux vices. Entre le "tout esprit" et le "tout nature", Régis Debray choisit le "milieu", dans tous les sens du terme. "Quel chemin emprunter ? Celui qui peut renouer les fils entre la Terre, l'Homme et le Cosmos, et remplacer par la notion de milieu celle d'environnement, imposée par son usage anglo-saxon."
Notre "milieu" n'est pas la planète ou l'univers, mais ce qui nous entoure, qui nous fait, et que nous faisons. C'est à la fois l'esprit et la nature, l'un étant nécessaire à l'autre. "Il faut cultiver notre jardin."