Partager la publication "[Critique série] THE OUTSIDER – Saison 1"
Titre original : The Outsider
Note:Origine : États-Unis
Créateur : Richard Price
Réalisateurs : Jason Bateman, Andrew Bernstein, Igor Martinovic, Karyn Kusama, Daina Reid, J.D. Dillard, Charlotte Brändström
Distribution : Ben Mendelsohn, Cynthia Erivo, Bill Camp, Jeremy Bobb, Julianna Nicholson, Mare Winningham, Paddy Considine, Yul Vazquez, Marc Menchaca, Max Beesley, Derek Cecil, Nicholas Pryor…
Genre : Thriller/Horreur/Adaptation
Diffusion en France : OCS
Nombre d’épisodes : 10
Le Pitch :
Le corps mutilé d’un garçon de 11 ans est retrouvé aux abords d’une petite ville de l’Oklahoma. Rapidement, les indices, accablants, mènent à l’arrestation de Terry Maitland, un coach de base-ball aimé et respecté de tous. Terry qui, malgré les traces ADN retrouvées sur les lieux du crime, peut apporter la preuve qu’il était en déplacement loin de la ville le jour du meurtre. De quoi considérablement compliquer l’enquête de Ralph Anderson, le détective en charge. Un homme qui ne va pas tarder à voir ses certitudes voler en éclats…
La Critique de la saison 1 de The Outsider :
Il ne fallut pas longtemps à HBO pour acheter les droits de L’Outsider, l’un des derniers romans en date de Stephen King. Le prestigieux network en profitant ainsi pour sauter à pieds joints dans un genre qu’il avait jusqu’ici un peu délaissé (l’horreur), tout en adaptant enfin à son tour les écrits de King. À noter que The Outsider n’a absolument rien à voir avec la série en 3 saisons Mr. Mercedes, quant à elle portée par Audience Network. Pourquoi une telle précision ? Car les romans eux, sont liés. Le personnage de Holly Gibney apparaissant dans chacun d’entre eux. L’Outsider se posant quelque peu comme une sorte de suite de la trilogie Bill Hodges, initiée avec Mr. Mercedes. Cette petite précision étant faite, intéressons-nous à cette ambitieuse série qu’est The Outsider…
Nouvelle part des ténèbres
S’il campe l’homme que tout accuse dans la série, Jason Bateman est aussi celui qui a la lourde tâche de tenir la caméra et ainsi de donner le ton. Réalisateur des deux premiers épisodes, Bateman parvient, très rapidement, grâce à une écriture qui colle d’emblée de près à la prose de Stephen King, à instaurer une ambiance à couper au couteau très efficace, où le malaise et l’horreur ne sont jamais bien loin. Une entrée en matière exemplaire et même traumatisante plus qu’à son tour qui fait du même coup beaucoup de promesses aux spectateurs. Et ce que l’on ait lu le roman ou non. Avec sa photographie très travaillée participant à l’immersion et ses acteurs, tous excellents et de plus dirigés de main de maître, The Outsider vient très vite se placer dans le sillage de la première saison de True Detective, sans chercher à singer cette dernière, mais en trouvant sa propre voie. L’univers et les codes propres à King étant ici pris en compte. Ce qui change tout et offre au show la possibilité de se démarquer sans tâtonner inutilement ou tourner autour du pot.
Voyage au cœur de l’horreur
Affichant une ambition hors-norme sur à peu près tous les plans, la série du showrunner Richard Price (qui fut le scénariste de films comme La Couleur de l’argent ou Mad Dog and Glory), prend également son temps. Loin des standards plus tapageurs propres à notre époque, The Outsider avance à son rythme, en prenant soin de distiller ses effets afin d’amorcer une lente mais inexorable montée en puissance, parsemée d’éclairs de violence barbare propres au genre qu’elle ne cesse de titiller (l’horreur donc). On pourra alors déplorer un petit ventre mou à mi-parcours alors que le livre savait justement habilement éviter l’enlisement, mais on apprécie au final surtout l’application dont le scénario fait preuve, de concert avec les excellents réalisateurs impliqués. Un peu à l’image de True Detective donc, The Outsider préfère s’aménager des pauses pour laisser respirer son intrigue et pour laisser le temps aux personnages d’exister. Des personnages par ailleurs -comme souligné plus haut- remarquablement campés tout du long. Ben Mendelsohn, dans un rôle éloigné de sa zone de confort, à fleur de peau et touchant, le toujours solide Bill Camp ou encore l’excellente Cynthia Erivo, qui livre son interprétation du personnage clé d’Holly Gibney, parvenant à se l’approprier en faisant preuve d’un parfait sens de la nuance.
El Cuco
Abordant des thématiques difficiles, comme le deuil, la famille et la rédemption, The Outsider tient tout autant du drame que de la série purement horrifique. Comme le livre donc, lui qui, il est bon de le répéter, est sans cesse suivi de près, même si au fond, le show se permet aussi quelques incartades lui offrant l’opportunité de sonner avec sa propre voix. Réflexion sur le pouvoir et la complexité de la foi et sur la résilience, The Outsider fait ainsi preuve d’une grande maîtrise narrative, d’autant plus appréciable que quand il faut aller au charbon, elle sait aussi y aller franchement. Les éclairs gore et les séquences purement horrifiques s’avérant à chaque fois terriblement marquants. À la fin en particulier, avec un ultime épisode au sein duquel, et ce de bien des façons, se télescopent toutes les thématiques abordées jusqu’alors. Et c’est dans cette accélération finale, quand vient le moment de dévoiler ses dernières cartes, que The Outsider finit de prouver sa valeur. Sans trop en faire mais sans jamais reculer non plus devant ses engagements, rendant justice à son récit, à son modèle et bien sûr à son public.
En Bref…
Flagrante réussite, The Outsider sait se montrer aussi effrayante qu’émouvante et pertinente. Très fidèle au roman de Stephen King, elle s’impose également grâce à ses qualités esthétiques, à ses acteurs et son écriture, pleine de sensibilité, qui sait entretenir le suspense et ménager ses effets afin d’exploser lors d’un final en tous points mémorable. Assurément l’une des meilleures adaptations de Stephen King, télévision et cinéma confondus.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : HBO