Silence. De ténèbres ?
A ces heures si lentes
où la nuit n’est plus guère
que le vide qui vit
sa vibration dernière,
pour qui, tout éveillé,
de son lit, sans lumière,
perçoit l’obscurité
comme de la poussière
qui pullule à l’entour,
en un vaste concert
où la nuit qui murmure
s’embrume à la lisière
d’une réalité
plus que jamais légère,
quand le vide absolu
se transforme en matière
possible d’Infini,
comme un écho précaire
au néant qui est tout
Silence
planétaire
*
Noche planetaria
Silencio. ¿De tiniebla?
A estas horas lentísimas
Sólo en la noche queda
Vacío en vibración
Última de existencia
Para quien, sin dormir,
Desde su lecho a ciegas
Siente la oscuridad
Como una polvorienta
Pululación en torno,
Que al oído rodea
De un susurro en el límite
De la noche y su niebla
De realidad, ahora
Más que nunca ligera,
Cuando lo más desierto
Se resuelve en materia
Posible de Infinito,
Y ya casi resuena
Con nada que lo es todo.
Silencio
de planeta.
***
Jorge Guillén (1893-1984) – Cántico – Traduction inédite du Centre de recherche sur l’Espagne contemporaine (CREC), atelier « traduction poétique », sous la direction de Serge Salaün, Université Sorbonne Nouvelle, Paris 3.