Magazine Culture
L’Humanité publie un hors-série exceptionnel consacré à l’auteur-compositeur-interprète, mort le 13 mars 2010. Le récit d’une vie d’homme et d’artiste, agrémenté de documents et de photographies rares.
«Faut-il pleurer, faut-il en rire / Fait-elle envie ou bien pitié / Je n’ai pas le cœur à le dire / On ne voit pas le temps passer.» Dix ans après la disparition de l’artiste, l’ami Jean Ferrat reste si absent et si présent, en chacun d’entre nous, que les mots s’épuisent à imaginer qu’une décennie vient, déjà, de s’écouler sans lui. Le 13 mars 2010, Jean nous quittait, nous laissant l’immense legs de sa musique, de ses luttes ardentes, de son humanité, comme s’il refermait l’un des plus beaux chapitres de notre histoire commune. Une histoire de profonde liberté d’agir et de penser: un homme qui ne trichait pas…
À l’occasion de ce triste «anniversaire», l’Humanité se devait d’être à la hauteur de l’artiste, dont la disparition fut un événement national, dépassant tous les cadres imaginables, tant l’émotion et le chagrin ressentis bouleversèrent «sa» France. Le hors-série exceptionnel que nous publions ressemble ainsi à un livre-miroir, mêlant biographie, photographies et documents, dans lequel l’image et le texte font corps. Vous y rencontrerez Jean Ferrat à chaque étape de sa vie, des plus joyeuses aux plus douloureuses, de ce «petit Versaillais à l’air timide», à «l’artiste que vient voir et applaudir un public immense», de Jean Tenenbaum à Jean Ferrat, au fil d’un destin rare, jalonné de rencontres, structuré par les luttes, inspiré par l’amour de la poésie, lui, le gamin des quartiers populaires, orphelin d’un père mort à Auschwitz. Grâce à la gentillesse de Gérard Meys, l’ami et producteur de toujours, qui nous accorde un très long entretien, vous découvrirez le manuscrit inédit de Nuit et Brouillard, rédigé de la main de Jean.
Au fil des pages – où vous retrouverez la figure d’Aragon, bien entendu, pour qui Jean Ferrat eut une admiration sans bornes –, nous revisitons l’humanisme combatif de Ferrat, qui fut autant la matrice de son œuvre qu’une thérapie, aussi, de sa propre histoire. Comme la source intime de ses engagements. Des portes des usines, où il soutient les ouvriers en grève, aux pavés parisiens de Mai 68, Jean Ferrat n’a cessé de défendre son idéal au prix d’une censure violente. Cet idéal, c’était son communisme, affranchi des réalités soviétiques. Ce hors-série invite donc au souvenir. Et à l’héritage. Afin de partager l’histoire de cette vie d’exception. Décidément: «On ne voit pas le temps passer»…
[ARTICLE publié dans l'Humanité du 5 mars 2020.]