Je me dois donc de préciser que je ne mets pas ici l'islam en accusation. C’est bien d’un "sentiment religieux", dont j’ai fait mention car c'est "une certaine lecture de l'islam" empreinte de lourdeurs culturelles oppressantes pour les deux sexes qui sont ici en cause.
Ensuite, Islam-Ayeh considère que l’origine de ce phénomène est davantage d’ordre économique et social. Je crois alors pouvoir lui rétorquer que très justement, cette situation économique et sociale (pour reprendre ses mots), et (j’ajouterais) politique, constitue un terreau fertile pour le développement d’un sentiment religieux flirtant avec le fondamentalisme, en Égypte et ailleurs dans le monde arabe. Le dogme qui se répand insidieusement relègue le corps de la femme à un bout de chair coupable invitant à la tentation et asservit finalement l'homme à ses plus basses pulsions (ici, ici, ici et là).
Je lui concède cependant que cette guerre des sexes, dont les femmes sont les vaincues évidentes et flagrantes, n’est probablement pas récente dans l’histoire du monde arabe. Comme je l’ai souvent exprimé, elle est certes le fruit d’héritages culturels, mais elle est surtout le résultat d’une tradition religieuse confisquée par les hommes à leur profit, en vue de pérenniser la soumission du « sexe faible » ou plutôt devrais-je dire du « deuxième sexe ». Ce n’est pas là l’apanage exclusif de la religion musulmane, puisqu’elle partage ce trait avec ses consœurs monothéistes chrétienne et juive.
Je constate néanmoins que le monde arabe a sans doute encore plus de mal à se débarrasser de ses oripeaux machistes. Ma thèse personnelle rejoint assez parfaitement la 4ème de couverture du roman de Tahar Ben Jelloun (voir plus bas)* que j’ai lu récemment : le problème dans les relations hommes-femmes dans le monde arabe c’est notamment que « pour aimer l’autre, pour se donner, il faut s’aimer un peu soi-même ». Faudrait-il pour panser les plaies psychologiques des sociétés arabes, regonfler l’estime des hommes pour que les femmes retrouvent enfin la place qui leur est due : non celle de soumises, non celle de rivales, mais celle de partenaire et d’alter ego ?
* Le premier amour est toujours le dernier ; Tahar Ben Jelloun
" Dans mon pays, il y a quelque chose de brisé dans les relations entre l'homme et la femme. Au sein du couple, il n'y a point d'harmonie. L'amour est le reflet d'une grande violence. Il est trop souvent confondu avec la sexualité. Alors que la femme dit qu'il n'y a pas de sexualité sans amour, l'homme lui répond ; pas forcément.
Ce livre raconte le déséquilibre et les malentendus entre l'homme et la femme arabes. Les histoires qu'on y trouve ne parlent que d'amour, c’est-à-dire de solitude, de secret et d’incompréhension. Et puis ce besoin d’amour devient vite une recherche de soi, car pour aimer l’autre, pour donner, il faut s’aimer un peu soi-même. Ce n’est pas si simple, dans un pays où la tradition et la religion aident surtout l’homme à s’asseoir sa petite puissance, alors même que rien ne peut s’y faire sans la femme."