Quatrième de couverture:
« J’ai encore tué quelqu’un. Je suis un tueur en série. D’accord, deux cadavres, c’est une petite série, mais c’est une série quand même. Et je suis jeune. Qui sait jusqu’où les opportunités me mèneront ? L’occasion fait le larron, le meurtrier ou la pâtissière. C’est documenté. »
La prison brise les hommes, mais la cage excite les bêtes.
On retrouve le héros (toujours anonyme) de La bête à sa mère, en prison évidemment suite à ses « aventures » du premier tome. Il est dans une aile psychiatrique mais dans une prison normale. Les pensionnaires de cette « wing » sont appelés les coucous. Et évidemment, dans ce microcosme fermé, notre narrateur va continuer à se faire des films, à interpréter les messages et comportements des autres dans le sens de sa mégalomanie : il croit que son agente pénitentiaire référente est amoureuse de lui, il cherche à attirer l’attention du caïd de service – et y réussit… et je ne vous raconte évidemment pas l’effet boule de neige qui fait monter la sauce. Sur la vie en prison, David Goudreault, travailleur social et animateur d’ateliers d’écriutre, est vraiment bien « documenté »
Encore une fois, j’ai lu partagée entre les yeux ronds et le fou rire (l’horreur aussi (attention risque de spoiler) : oh punaise, je n’ai pas vu venir le coup des tourterelles et pourtant j’étais prévenue depuis le premier tome) mais ce que j’ai encore plus apprécié dans ce deuxième opus, ce sont les jeux de mots, les à peu près, les figures de style, les innombrables références culturelles (je suis sûre d’en avoir loupé plusieurs, surtout les typiquement québécoises, mais ce n’est pas grave). Je vous en livre quelques-uns pêle-mêle, en attendant de lire le dernier titre de la trilogie qui s’appelle Abattre la bête, ça promet !
« Les tourterelles profitaient alors du pain ou du riz que je leur avais réservés. Elles s’approchaient de plus en plus de moi. Au bout de trois mois, certaines venaient même manger dans ma main. Javais des airs de saint François, un ornithologue catholique de renommée mondiale. » (p. 37)
« Je n’aime pas la poésie. Que ce soit long ou court, c’est toujours con et lourd. »
« Le grand jour était venu. Et c’était mon anniversaire en plus. Vingt-deux ans l’âge du Christ. Paraît qu’il est mort ultérieurement, mais il a dû faire quelque chose d’impressionnant à vingt-deux ans, lui aussi. C’était un prolifique,le petit Jésus. » (p. 149)
« Les mauvaises surprises s’entassaient comme des Tutsis au fond d’une fosse. » (p. 147) (Eh oui, il ose tout, David Goudreault…)
« If you can’t be them, beat them, aimait ruminer Watson Churchill, un politicien de l’Europe de l’Ouest. J’ai vu un documentaire sur lui à Canal D, entre deux enquêtes policières. Churchill a été fort utile pendant une guerre mondiale pour battre les skinheads et les nazis allemands. C’est Staline qui a fait le gros de la job, mais le petit chauve a habilement tiré son épingle du jeu. Le plus important, ce n’est pas tant d’être celui qui gagne la guerre que celui qui en profite le plus. Il ‘inspirait, Churchill. Staline aussi, mais autrement. J’aspirais à utiliser les stratégies du premier pour vivre dans l’opulence du second. » (p. 173)
David GOUDREAULT, La bête et sa cage, Stanké, 2016