À l'occasion de la publication par l'observatoire des tarifs bancaires (dépendant de la Banque de France) de son étude annuelle, qui révèle une certaine stabilité des frais facturés, l'association de consommateurs UFC-Que Choisir s'élève violemment contre l'opacité des plaquettes commerciales diffusées par les établissements.
Après une relative amélioration de la transparence ces dernières années, due notamment à l'instauration, en 2010, de l'extrait standard des tarifs (EST), afin de faciliter la comparaison des coûts des 12 services les plus populaires, la mise en place progressive du nouveau document d'information tarifaire (DIT) imposé par l'Europe semble procurer une occasion aux banques hexagonales de revenir à leurs vieux démons de complexité, d'illisibilité, de confusion, d'amour pour le jargon incompréhensible…
Les dérives constatées comprennent plusieurs exemples édifiants, tels que les 410 éléments énumérés dans le catalogue [PDF] complet de BNP Paribas ou encore les 50 pages de celui de Société Générale. Les fascicules de synthèse eux-mêmes sont maintenant conçus pour réduire leur utilité pratique, comme l'illustrent les 8 pages du DIT partagé [PDF] par le Crédit Agricole, au sein desquelles sont détaillées toutes les composantes de chacun des forfaits disponibles, au détriment de la comparabilité.
Les nouvelles offres à 2 euros par mois (Eko ou Kapsul, entre autres), pourtant présentées comme des modèles de simplicité et de clarté tarifaire, ne sont pas épargnées par cette fâcheuse tendance. Noyées dans les brochures génériques des banques, elles peuvent générer des surprises de facturation à ceux qui ne les parcourent pas attentivement avant de souscrire (ou, par la suite, lors de chaque modification). Et, naturellement, chaque produit supplémentaire accroît la lourdeur des documents…
La conclusion que tire l'UFC-Que Choisir de ses constats est qu'il est illusoire de compter sur les institutions financières pour œuvrer durablement dans l'intérêt de leurs clients. En l'absence de confiance, il reviendrait alors aux pouvoirs publics de prendre des mesures drastiques, depuis l'inscription dans la loi des règles précises de communication des tarifs jusqu'à, peut-être, le déploiement d'une plate-forme de comparaison contextuelle des offres, à l'image de celle (privée) qui existe au Royaume-Uni.
Avant d'en arriver à de telles extrémités, les banques devraient tout de même prendre conscience de l'erreur magistrale qu'elles sont en train de commettre. Car, même si la menace des néo-banques aux services gratuits paraît s'essouffler (temporairement ?), il n'en reste pas moins que l'exigence de transparence des consommateurs est intacte : quand ils ont les moyens de comparer objectivement les prix (comme avec Revolut ou TransferWise, pour ne citer qu'eux), ils n'hésitent pas et fuient les acteurs historiques.
Croire que des conditions tarifaires obscures constituent la meilleure stratégie pour continuer à assurer le flux de commissions et de frais (de 25 milliards d'euros par an), vital dans l'environnement de taux bas actuels, est une absurdité totale, qui se retournera tôt ou tard contre les banques. Le plus triste est que, en toute candeur, je pense que les responsables des brochures ne se rendent tout bonnement pas compte de l'importance critique de simplifier cet élément essentiel de la relation avec le client. Ce ne serait donc finalement qu'un enjeu d'expérience utilisateur qui leur échappe encore.