En réalité, ça a commencé comme ça, en décembre 2012 : Je suis ultra chaud comme une baraque à frite pour le concert de Peter Hook & the Light le 17 Décembre!!!!!! Il me faut cette place ou je vais crever en voyant la fin du monde le 21 décembre. C'est à dire que je provoquerai la fin du monde vendredi de la semaine prochaine.......
Sacha venait de gagner une place pour le concert de Peter Hook. Et voilà que 7 ans plus tard, il me contacte en disant qu'il lance une chaîne Youtube pour faire de la promo de sorties d'albums. En me glissant : " Je t'écris parce que tu fais partie des médias qui continuent de faire vivre le rock et qui m'ont aussi donné de découvrir et de faire découvrir la musique. " Honnêtement, c'est typiquement le genre de retour qui fait vraiment plaisir. Bref, quelques vidéos plus tard, j'ai eu envie de creuser un peu leur projet.
Les sorties d'albums rock, c'est l'origine de Tangerine. Racontez-nous...
Kelly : Je suis journaliste dans la musique depuis quelques années, sur le papier. J'avais envie de retourner vers le format vidéo, déjà parce que j'aime ça, et puis parce que le YouTube rock en France est assez peu développé. Il y a quelques vidéastes, mais c'est en général vraiment spécialisé dans un ou quelques sous-genres de ce qu'on appelle le rock au sens large. J'ai posté un appel sur mes réseaux sociaux, parce que je n'avais pas envie de le faire seule, et Sacha a tout de suite répondu, me disant qu'il avait une idée similaire derrière la tête.
Sacha : Je suis parti du constat que toute la musique en France avait le droit à de multiples médias vidéos alors que le rock il n'y avait pas grand chose. Il y a eu quelques YouTubers il y a quelques années qui parlaient de rock, mais c'est moins le cas aujourd'hui. Ça découle du fait que le rock est moins grand public que ce qu'il a pu être il y a encore 10 ans, mais c'est normal, il y a eu l'ascension d'énormément de nouveaux genres : le rap, l'électro... Ça tourne en fait. Mais le rock est encore bien présent, il y a énormément de chose à dire et c'est pour ça qu'on est là !
Kelly : On voulait vraiment couvrir toute cette scène-là : le rock, le métal, et tout ce qui s'y affilie. L'idée, c'était de garder la base des médias musicaux (donc de la critique, du reportage, des interviews - ces dernières sont à venir), tout en ayant la liberté de parler de sujets de fond, sur la musique plus généralement, les problématiques sociales et économiques qu'on rencontre dans l'industrie, etc.
NDLR : en effet, outre les sorties mensuelles, Tangerine a publié deux vidéos sur les sujets de fond de la musique :
Kelly : Je pense qu'on a une grosse base commune, de toute façon. Sacha est très spécialisé dans la scène indé, et moi je touche un peu à tout, y compris au métal extrême effectivement. J'aime énormément de choses : du métal, du rock de toutes sortes, certaines formes d'électro et de pop, et surtout j'adore quand tous ces genres se mélangent.
Sacha : Pour préciser, je suis vraiment plus pop/rock/new wave, avec toute la culture tellement riche des années 80-90 de Manchester. Ça a été très simple de s'associer parce qu'on est fermé à rien. L'enfermement c'est ce qui va te créer la difficulté d'écouter alors qu'il n'y a pas besoin parce que chaque genre musical découle d'un autre genre. Te fermer à un genre c'est te fermer à une partie de ses origines et à ses possibles mutations. La musique c'est pas qu'une histoire d'instrument et de mélodie c'est aussi quelque chose de lié à l'énergie, tu as de l'électro comme Kap Bambino qui relève de l'énergie punk et ça quand tu l'as dans les oreilles ça fait resurgir tes références et ça te prend aux tripes.
Kelly : On a chacun nos préférences, c'est sûr. Mais ce qui est bien, surtout, c'est qu'on se fait découvrir des choses. Je montre souvent des groupes de métal à Sacha, et même s'il n'aime pas forcément tout ce que je lui montre, ça l'intéresse toujours.
Le nom, c'est un clin d'œil à Led Zep ?
Sacha : Entre autres. C'est notre petit secret. Tangerine fait référence à beaucoup de choses dans le domaine de la musique, et Led Zep en fait partie.
Comment vous vous y prenez pour faire une vidéo mensuelle ? S'agit-il uniquement de coups de cœur ou il y a un peu de promo qu'on vous demande ?
Sacha : 0 promo, c'est 100% des coups de cœur, que ce soit des artistes déjà bien implantés ou des nouveautés, sur la scène Française ou internationale. C'est parfois même des groupes qui débutent complètement ou qui ont un public de niche. On est vraiment là pour parler de ce que l'on aime et de ce qui anime nos oreilles au quotidien. En gros, on écoute chacun de nos côtés des artistes que l'on suit et que l'on découvre, on se les envoie, on se les fait écouter et on choisit ce qui nous a vraiment touché pour ensuite les mettre en image et essayer de transmettre à l'audience la jouissance auditive que l'on a eue.
NDLR : et ça marche ! C'est grâce à Tangerine que j'ai découvert Lysistrata, qui en effet est un peu trop métal pour moi sur du long terme, mais m'a fait clairement accrocher avec l'album qui a un peu tourné fin 2019.
Kelly : Chaque mois, on a un document collaboratif où on écrit les noms des albums qui sortent et qu'on écoute au fur et à mesure. On reçoit bien des mails qui nous demandent de faire de la promo de tel ou tel artiste, mais à moins d'avoir un gros coup de cœur, on en parlera pas. Tangerine, c'est vraiment notre plateforme à nous, et on a envie de parler de choses qui nous ressemblent, et non parce qu'on nous le demande. Au moment d'écrire la vidéo, on se retrouve avec une liste de disques, et on fait notre petite sélection de ce qui nous paraît être le plus intéressant. Idem pour les news d'ailleurs. Ensuite, on passe à l'écriture, puis vient l'enregistrement, et enfin le montage.
Pourquoi avoir choisi le format vidéo ? C'est assez chronophage, non ?
Kelly : Ça prend un peu de temps, c'est vrai. Mais comme on est deux, ça reste très faisable. Il y a des mois où on a sorti deux vidéos, soit une toute les deux semaines, alors qu'on bosse tous les deux à côté.
Sacha : Si c'était tout le temps le même contenu, ce serait vraiment pénible, mais il y a tellement de nouveauté que ça paraît assez rapide à faire au final, on n'a pas le temps de se lasser. La vidéo, c'est un média très récent. Déjà le cinéma, la TV sont des procédés audiovisuels que je trouve absolument fascinants. Ils le sont encore plus depuis le développement d'internet et des smartphones. Le format vidéo nous permet de diffuser non seulement du son, mais aussi du clip, qui reste un élément majeur pour un artiste. C'est ce qui permet de mettre en avant son univers et de le faire découvrir au public. Il y a des morceaux qui te restent 2 fois plus en tête quand tu regardes le clip, ça te marque l'esprit tu trouves ça génial.
Kelly : La vidéo web est un média que je consomme beaucoup, personnellement, bien plus que les autres. Alors forcément, j'avais envie de m'exprimer de cette manière là. On essaye toujours de faire une vidéo que nous mêmes on aurait envie de regarder si elle passait dans notre fil d'actu. Comme je l'évoquais plus haut, on trouvait aussi qu'il y avait un créneau à prendre. Mais surtout, l'avantage de faire de la vidéo web est double : la vidéo permet de montrer, et de faire écouter, ce qui est quand même important quand on parle de musique. Et le web, surtout en indépendant, permet une vraie liberté. Dans un média traditionnel, il y a des formats à respecter, des problématiques de longueur, une approbation à obtenir de tes supérieurs, etc. Là, théoriquement, si on veut faire une vidéo de deux heures sur un sujet un peu controversé ou complètement obscur, on peut !
Sacha : En fait on est libre de créer comme bon nous semble et on peut se planter, on se plantera peut-être sur certaines choses mais c'est pas grave tant qu'on essaie de vouloir présenter le rock et affilié sous de nouvelles formes.
Sacha : Les premiers retours sont super positifs, on a fait presque 300 abonnés en 3 mois ce qui est grandiose. On nous dit souvent que c'est rafraîchissant dans les médias rock. Ce qui fonctionne le mieux c'est le bouche à oreille bien sûr mais on communique aussi sur nos réseaux sociaux (Facebook, Twitter & Instagram). On se fait aussi relayer par des labels, des groupes ou d'autres vidéastes et journalistes, ça nous aide beaucoup à gagner en visibilité.
Kelly : Je ne m'attendais pas à ce que ça fonctionne aussi bien. On est encore au début, et pourtant on a déjà plein de gens qui viennent nous donner leur avis et nous partager ce qu'ils écoutent, via les commentaires YouTube principalement. C'est génial de créer cet échange !
Quels sont vos objectifs/projets cette année ?
Sacha : On continue l'actualité musicale, et on va aussi continuer les approches critiques sur l'industrie musicale, il y a beaucoup de choses à dire, notamment depuis l'arrivée du numérique, on ne cesse d'évoluer dans les pratiques d'écoutes d'années en années.
Kelly : On aimerait aussi développer d'autres formats, à plus ou moins long terme, notamment les interviews d'artistes. On peut pas vous dire si ça se fera cette année (on l'espère), parce que ça va dépendre de plein de contraintes, techniques notamment, mais ça se fera un jour ou l'autre !
NDLR : pour ceux qui aiment les bilans d'année (en complément du bilan des sorties d'albums rock 2019 par Merseyside)
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