Responsabilité - Réactiver la responsabilité individuelle, d'Alain Laurent

Publié le 16 février 2020 par Francisrichard @francisrichard

Comme le dit Alain Laurent, jamais autant qu'aujourd'hui on n'a employé le mot de responsable alors que, dans la réalité, on n'a jamais été aussi irresponsable. Ce n'est un paradoxe qu'en apparence.

La raison de ce pseudo paradoxe réside en effet dans le sens que l'on donne au mot Responsabilité. De nos jours on récuse ainsi la responsabilité individuelle mais pas la responsabilité collective.

Or la responsabilité collective est justement une construction perverse de l'esprit. On ne peut être responsable qu'individuellement et ce n'est pas le fait de vivre en société qui y change quoi que ce soit.

Comme dit Jean-François Revel: La responsabilité collective est le degré le plus vil de la morale . Car, tous ensemble étant responsables, au bout du compte personne ne l'est, ce qui est bien commode.

Cette aberration vient de la mise en cause du libre arbitre par les adeptes de ce que l'auteur appelle d'une part le neuroscientisme (où d'aucuns confondent corrélation et causalité), de l'autre le sociologisme .

Les premiers invoquent un neurodéterminisme sans tenir compte du pouvoir rétroagissant de la prise de conscience par l'être humain, capable de s'y opposer et d'agir dans une direction non prédéterminée.

Les seconds invoquent un déterminisme social , sans tenir compte de l'accès d'individus, , [...] à personnellement ou en coopérant avec d'autres . une certaine autonomie en exerçant un pouvoir sur soi

Ces seconds, que caractérisent le causalisme social et l'idéologie de l'excuse , mettent en cause notamment le caractère "illimité" de la responsabilité individuelle dans un contexte supposément "néolibéral" .

Or personne, fût-il un indécrottable "néolibéral" ou un invétéré partisan du libre arbitre , n'a jamais pu professer une thèse aussi absurde . Ce qui est vrai, c'est que la responsabilité de soi est illimitée:

Dans la responsabilité de soi s'exprime une revendication d'autonomie et d'indépendance individuelles, le fait de vouloir autant que possible ne pas dépendre de l'arbitraire de volontés extérieures à soi.

En fait la responsabilité individualisée est perçue comme une charge trop lourde à supporter à réduire au minimum ou à laquelle tout simplement renoncer . Et l'État-providence encourage cette perception.

Alors, pour aller contre, il faut rappeler l'étymologie du mot responsabilité : se porter garant ( sponseo : répondre des dettes commises par une autre personne) , et être fier de se porter garant et d'"y arriver".

Comme l'écrivent Jean-Philippe Delsol et Nicolas Lecaussin dans Échec de l'État: Rendre à chacun la responsabilité de sa vie est non seulement souhaitable pour chacun, mais également nécessaire pour la société.

Alain Laurent commente:

Parce qu'on peut a priori y faire davantage confiance à des individus garants d'eux-mêmes, capables d'auto-discipline, aimant le gouvernement de soi et appréciant d'en être récompensés, qui font d'eux-mêmes ce qui convient, et assument volontiers les conséquences de leurs éventuelles inconséquences, une "société de responsabilité" est ipso facto une société de liberté qui peut amplement s'autoréguler.

Ce n'est pas gagné d'avance, selon l'auteur:

Pris en étau entre les déterminismes de l'inconscient neural et les automatismes de la métaconscience prescriptive et prédictive de l'IA [l'Intelligence "artificielle"] , l'individu du futur sera de moins en moins en mesure de pouvoir gouverner lui-même sa propre vie.

Francis Richard

Responsabilité - Réactiver la responsabilité individuelle, Alain Laurent, 174 pages, Les Belles Lettres

Livre précédent:

En finir avec l'angélisme pénal (2013)