Où il est question de zizi, de démission, d'hypocrisie, de souffrance sociale, et de nausée présidentielle.
Bref, de zinzins.
Le zizi.
Le plus fidèle et le plus carnassier des proches d'Emmanuel Macron jette l'éponge d'une campagne municipale ratée. C'est presque trop beau, trop surprenant pour être vrai. Benjamin Griveaux, ex-fidèle de Dominique Strauss-Kahn, démissionne à cause de deux vidéos présentant prétendument le sexe en pleine masturbation d'un homme qui serait Griveaux d'après un artiste russe violent et controversé.
Ces deux vidéos sont d'abord relayées par ... deux macronistes. Cela n'empêche pas les éditocrates officiels - Barbier, Saint-Cricq et consorts - de s'indigner contre l'anonymat des réseaux sociaux qui pourtant n'y est pour rien. Toute la classe politique, y compris les insoumis (Mélenchon, Corbieres, Autain etc) expriment leur rejet de ces pratiques.
Quel vaudeville... "Le mec qui est ministre et qui fait ça, c'est un con" résume fort justement Serge July.
Griveaux, dont la campagne sombrait semaine après semaine, a le regard éploré devant une caméra fixe, tandis qu'on se souvenait de tant de reportages "people" préparés par Mimi Marchand, directrice de l'agence de photo Bestimage.
Ce vaudeville n'a aucune importance politique.
Griveaux n'est pas Dreyfus, faudrait-il le rappeler ?
La souffrance
En France, en 2020, les complémentaires santé, obligatoires, augmentent leurs tarifs d'environ 80 euros par an, selon l'association UFC-Que Choisir. Comme tout le monde le note, cette hausse "coïncide" avec l'entrée en vigueur depuis le 1er janvier du "100% Santé" pour l'optique et certains soins dentaires. La ministre Agnès Buzyn clamait sa satisfaction avec la mise en place d'une promesse présidentielle - les lunettes et les prothèses dentaires gratuites ! Hélas, la réalité rattrape et contredit la belle histoire: l'Etat devenu macroniste n'est pas devenu soudainement généreux: les ménages payent via l'augmentation des tarifs de leurs complémentaires.Les personnels de l'hôpital public manifestent le jour de la Saint Valentin, à l'appel de quinze syndicats et collectifs. En 2020, les hôpitaux publics, dont six sur dix sont en difficultés financières," devront encore faire 800 millions d’euros d’économies" résumait Le Parisien.
En France, en 2020, on se félicite que le chômage baisse à un niveau record ... depuis le début de la Grande Crise en 2008. La boucle semble bouclée: la France ne compterait que 8,1% de chômeurs au quatrième trimestre 2019 selon l'INSEE. « C'est une très bonne nouvelle. La peur d'embaucher a été levée », commente Macron dans les Alpes. Les experts macronistes se félicitent, forcément. Ils applaudissent aux "bonnes" mesures de réduction du "coût" du travail depuis 2015, amplifiées depuis 2017... ça ruisselle, ça ruisselle ! Même l'industrie recrute désormais (+8000 emplois nets en 2019) ! Au passage, on oublierait presque la petite relance forcée par le mouvement des Gilets Jaunes en 2019. On oubliera aussi que la production manufacturière en France s'affaisse depuis un an (-0,7% en 2019, -3% en décembre), que la France était en récession au dernier trimestre, et que l'inflation officielle repart à la hausse en janvier 2020 (+2% pour l'alimentation, +4% pour l'énergie):
Mais la vérité est ailleurs:
- Cette mesure incomplète du chômage n'est pas nouvelle, elle ne retient que les gens sans aucun travail ou presque (toute personne "qui n’a pas travaillé, ne serait-ce qu’une heure, au cours de la semaine de référence" (et est disponible pour travailler dans les deux semaines et a entrepris des démarches actives de recherche d’emploi dans le mois précédent). Il faut espérer que les près de 400 000 micro-entrepreneurs que compte le pays (+ 80 000 l'an passé) ont au moins travaillé une heure par semaine... La moitié des créations d'entreprise sont des mini-jobs.
- Seuls 66 % des adultes de 15-64 ans ont un job... Cela en laisse 34% sur le carreau ! Le volume d'inactivité, c'est-à-dire le nombre et la proportion de Français qui sont exclus de ces statistiques est impressionnant: 20% des 25-49 ans ne travaillent, un peu plus qu'il y a 10 ans.
- Le halo du chômage, c'est-à-dire les gens qui souhaitent un emploi sans être considérées au chômage, n'a cessé de progresser et atteint 1,7 million de personnes, un niveau plus élevé qu'en 2008, plus élevé qu'à n'importe quel trimestre depuis 20 ans.
- Le taux d'activité des plus vieux progresse encore un peu, à cause des réformes de retraites précédentes (Fillon 2003, Sarkozy 2010, Hollande 2015)
La catastrophe
Une station de sports d'hiver prévoit d'amener de la neige artificielle en hélicoptère. Et le jeune monarque s'affiche au sommet du Mont Blanc, un "sommet de la foutaise" explique le député Ruffin.
Avec sa doudoune à 1000 euros, Macron visite la mer de glace pour se montrer "concerné". Il est sérieux sur les photos officielles.
Le cortège présidentiel, avec sa centaine de participants (ministres, conseillers, gendarmes, agents de sécurité, etc), déboule à Chamonix, à l'improviste (l'Elysée n'avait prévenu qu'une semaine avant) pour inaugurer la création de l'Office de la biodiversité, une agence qui fusionne deux établissements existants.
Le coût de ce show présidentiel est estimé à 400 000 euros par un syndicat. L'aréopage présidentiel viendra en avion, les 400 participants ont droit à un joli cadeau : "le bilan carbone du séminaire sera compensé par des plantations d’arbres" proteste le nouveau directeur. Les syndicats de l'établissement sont surtout furieux du décalage entre cette fausse attention présidentielle et la souffrance des salariés, "la désorganisation qui a gagné tous les services", "l’externalisation de nombreuses activités des services de l’ex-ONCFS et de l’ex-AFB," le non-renouvellement des CDD. Grande victoire, la suppression d'une cinquantaine de postes permanents a été repoussée ... à 2021.
Depuis 2017, le ministère de l'Environnement a perdu 16 000 postes. Mais Macron créé un gadget de plus, un "Conseil de défense écologique".
Macron peut bien venir devant les caméras. Le 30 décembre dernier, un agent s'est suicidé, en uniforme, avec son arme de service, dans sa voiture.
Cette politique de spectacle permanent épuise à force de ridicule: Macron va-t-il plonger au fond de la Méditerranée pour nous sensibiliser à la pollution plastique ? Le site Reporterre dresse la trop longue liste des preuves de cette bouffonnerie macroniste: privatisation de l'office national des forêts, la réduction/simplification des normes environnementales, la multiplication des projets d'aménagement "en béton" qui artificialisent encore davantage les sols, le report de l’interdiction du plastique à usage unique à 2040, etc.
Au Parlement européen, une belle alliance conservatrice, portée par le parti macroniste, vote le financement public de 151 projets énergétiques dont 32 projets d’infrastructure gazière, au grand dam des écologistes, des insoumis et des associations de défense de l'environnement. En France, les macronistes expliquent que ces projets seront financés à condition d'être compatibles avec les objectifs écologiques de l'UE. C'est faux. Rien n'est pour l'instant voté. La Commissaire à l'énergie l'a simplement promis.
La nausée
Avant de faire son show sur les décombres de la politique environnementale du pays, Macron avait tenté un exercice de calinothérapie avec des députés macronistes. Dans la plus grande tradition sarkozyste, Jupiter dirige son parti et fait fi de respecter les apparences d'une séparation des pouvoirs.
Mardi soir, c'est aux frais de l'Elysée que Macron reçoit plus de 300 députés au Palais.
Ces député(e)s godillots votent comme l’exécutif leur dit de voter, ils/elles répètent ce que l’exécutif leur dit de répéter, à la virgule près. Macron leur cite Maurras, défend le "pays réel" contre le "pays légal". Il voudrait que la Macronie s'attache à l'immigration et l'insécurité, les deux thèmes odieusement accolés par et pour l'extrême droite.
A droite toute !
Mais les député(e)s doutent. Leur mentor leur a déjà reproché leur manque d'humanité quand ils ont voté contre l'extension à 12 jours du congé indemnisé en cas de deuil d'enfants. Ce soir-là, Macron leur demande "de l’unité" - Qui donc a vu des frondeurs au sein de LREM ? Le parti présidentiel préfère exclure, ou bien il déçoit, au point qu'une douzaine de député(e)s ont quitté les rangs.
En fin de semaine, tandis que la presse et ses éditocrates glosaient encore sur les "l'anonymat-ce fléau", la "démocratie menacée", et le grand complot russo-mélenchoniste contre Macron (ne riez pas), des manifestants obstinés battaient le pavé contre le Macronistan: scènes de violence ordinaire que celle de flics casqués, masqués, et brutaux. A Rennes, les opposants résistent et ne reculent pas devant les provocations.
A Chambery, un CRS impassible vide sa bombe lacrymogène sur des manifestants pour le climat assis pacifiquement.
Mais les affronts de ces zinzins ne provoquent aucun émoi chez nos éditocrates et chaînes d'info, trop occupées à gloser sur l'affaire du zizi de Griveaux.
Ami macroniste, où es-tu ?