Le souffle du mort .dominique sewane.nouvelle edition.

Publié le 14 février 2020 par Regardeloigne

 QUAI BRANLY

Salon de lecture Jacques Kerchache.
 Le vendredi 03 avril 2020 de 17:00 à 18:30

Rencontre avec Dominique Sewane,
Philippe Charlier et Grégory Berthier-
Gabrièle à l'occasion de la nouvelle
édition du 'Soufflffle du mort" publiée
chez PLON, collection "Terre Humaine".

Un livre essentiel sur la pensée spirituelle de l'un des peuples les plus méconnus de l'Afrique subsaharienne : les Batammariba, au nord des Républiques du Togo et du Bénin. Peuple fier, aux traditions de guerre et de chasse, il se reconnaît dans l'acte de construire des forteresses de terre pétrie disséminées dans des montagnes d'une saisissante beauté. La nuit appartient aux forces de la terre qui s'incarnent dans certains arbres, pierres, sources avec lesquelles se lient les défunts. Lors d'un rite de deuil, chacun se met à l'écoute du silence de la nuit, comme le Voyant aux sens en éveil. La mort est conjurée, détournée, afin que le souffle du défunt acquière la force de former un nouvel enfant. C'est à de tels instants que les Batammariba puisent leur vitalité.
Dominique Sewane a eu le privilège d'assister à leurs cérémonies en compagnie des Maîtres du savoir et de bénéficier de leur parole. Le lecteur participe à ses doutes, ses appréhensions, mais aussi à la révélation qu'est pour un Occidental une réflexion d'une rare profondeur sur le mystère de la mort, donnant raison à cette pensée du grand philosophe russe Léon Chestov : «Tout ce qui a été créé de meilleur et de plus fort, de plus important et de plus profond dans tous les domaines de la création, prend sa source dans la méditation sur la mort et dans la frayeur qu'elle inspire.»


Dominique Sewane, anthropologue, historienne et philosophe de formation, est accueillie depuis les années 1980 chez les Batammariba qui peuplent la vallée et la montagne de l'Atakora, au nord des Républiques du Togo et du Bénin. Au Togo, leur territoire, le Koutammakou, a été inscrit en 2004 au Patrimoine mondial de l'Unesco. Partageant leur existence dans des conditions extrêmes au cours de huit missions en solitaire, elle a eu le privilège d'assister à des rituels initiatiques et funéraires d'une haute spiritualité.


Responsable jusqu'en 2018 d'une chaire Unesco, unique en son genre, concernant la préservation du patrimoine culturel africain dans l'esprit de Terre Humaine, ses enseignements aux Hautes études commerciales (HEC) et à l'Institut d'études politiques (Sciences Pô) ont été centrés sur le patrimoine culturel immatériel de l'humanité. Sur les pas d'une lignée d'éminents chercheurs, elle témoigne dans ce livre d'une pensée complexe et subtile, emblématique de la millénaire sagesse africaine.

On peut lire sur le site de nombreux articles consacrés aux Batammariba et à DOMINIQUE SEWANE cliquer sur son nom dans les catégories à droite.

Un court extrait de la préface de la seconde édition montre combien une pensée traditionnelle est soucieuse du  milieu pour elle vivant ,qu'on  doit donc respecter et non  dominer  ou détruire à volonté.

L'attention et le soin que portent les Batâmmariba à leur territoire, la manière d'être à son écoute par l'intermédiaire des Voyants, les rituels qui, périodiquement célèbrent les rencontres avec les Grands Morts alliés de puissances chtoniennes, contribuent à le maintenir vivant. Les notions de « distance » et de « limite » sont pour eux fondamentales. Les habitations et champs cultivés ne sont si distants les uns des autres que pour respecter les parcelles réservées aux dibo : bosquets, cascades, cours d'eau, qu'il est interdit d'empiéter sinon pendant un rituel. Limites clairement dessinées sur le sol. Vis-à-vis de ces forces, tout habitant du Koutammakou, quel qu'il soit, d'où qu'il vienne, doit faire preuve d'humilité afin de bénéficier de leurs bienfaits. Il lui est demandé de se souvenir que les humains, tardivement arrivés, sont des intrus tolérés sur une terre qui ne leur appartient pas. Or, l'alliance sacrée est susceptible de se rompre à tout instant, pour peu que les règles de chasse et d'agriculture, interprétées par les Voyants, soient négligées par imprudence ou cupidité. Conséquences : tornades, ouragans, sécheresses sur l'ensemble du territoire. Au cours du grandiose rituel agraire qu'est le difwani, auquel sont initiés les jeunes garçons, l'eau et la boue sont magnifiées. Que ces éléments viennent à se raréfier, la survie des habitants sera compromise. « Je ne suis qu'un hôte de passage sur cette terre1 » pourrait dire comme le psalmiste l'Otâmmari, dont le devoir est de veiller à l'intégrité de son lieu pour le bien des générations futures."