Regina Wilson PILAWUK est une artiste aborigène rare non seulement de par son talent mais aussi de par sa virtuosité technique qu'elle démontre dans deux arts très différents : la vannerie et la peinture.
Née en 1948, elle a grandi dans la mission de Daly établie au sud de Darwin par des jésuites autrichiens à la fin du XIXème siècle. Il lui était interdit alors de célébrer des cérémonies jugées alors païennes par les missionnaires, de parler sa langue natale avec ses proches, ou bien encore de pratiquer la vannerie, un art transmis de génération en génération dans son groupe familial depuis des millénaires. Celui qui deviendrait plus tard son mari, Harold Wilson, fut quant à lui arraché enfant à sa famille pour être élevé sur l'île de Melville par une artiste Tiwi.
On comprend mieux pourquoi tous deux décidèrent de fuir la mission de Daly en 1969, accompagnés de leurs enfants et de quatre autres membres de leur groupe afin de retourner sur la terre de leurs ancêtres et s'installer dans ce qui deviendrait en 1973 la communauté de Peppimenarti, située dans la zone humide de la Daly River, à 300 km au sud-ouest de Darwin.
Peppimenarti ou " gros caillou " a été fondée sur un site sacré et représente pour les Aborigènes qui s'y sont installés un vrai retour aux sources.
Pouvant enfin pratiquer la vannerie, Regina l'enseigna aux plus jeunes ainsi que les cérémonies rituelles de son peuple.
C'est plus tard en participant au Festival des arts du Pacifique à Nouméa en 2000 qu'elle et ses amies eurent l'idée de s'initier à la peinture. En effet, ce medium attira leur attention car il leur permettait de consigner les formes des objets en vannerie de façon plus pérenne que les objets en eux-mêmes. Les artistes reproduisirent ainsi sur la toile les dessins des objets qu'elles tressaient. Les peintures complexes aux motifs hypnotiques de Regina Wilson ont rapidement éveillé l'intérêt du monde de l'art puisqu'elle s'est vu décerner en 2003 le célèbre Telstra National Indigenous and Torres-Strait Islander Art Award du meilleur artiste peintre aborigène.
Depuis lors, ses œuvres ont été exposées en Australie mais aussi en Europe et en Amérique du nord où a été montrée récemment une exposition itinérante (" Marking the Infinite ") qui a permis à ses toiles d'être accrochées entre 2016 et 2019 aux murs des musées suivants : Newcomb Art Museum, Tulane University, Nouvelle-Orléans ; Frost Art Museum, Florida International University, Miami ; Nevada Museum of Art, Reno ; The Phillips Collection, Washington DC et le Museum of Anthropology, University of British Columbia, Vancouver.
L'œuvre présentée plus haut reproduit le schéma complexe d'un tapis de soleil. Ces tapis étaient à l'origine de forme conique, ils étaient des objets de choix pour un peuple de cueilleur chasseur qui les utilisait comme panier, comme vêtement ou bien, posés à même le sol, servaient à recouvrir et protéger la nourriture du soleil, etc. Mais derrière ces lignes méticuleusement apposées se cache bien plus que la sacralisation d'une pratique artisanale élevée aujourd'hui au rang d'art : il s'agit de rendre hommage et de maintenir en vie une culture et un savoir plurimillénaires.