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11h55 au Palais Longchamp, mamans ou grand-mamans, bambins et poussettes quittent le jardin d'enfants derrière le kiosque à musique où s'ébroue un couple de danseurs, au soleil. Au pied d'un tilleul sans feuille, les gourmands qui ont échappé aux jardiniers des espaces verts de la ville caressent l'arrière-train du matou qui s'approche de mon banc. À la recherche d'un brin de compagnie, il s'étend de tout son long sur le banc de pierre que j'occupe depuis une petite heure. Les quatre fers en l'air, il accepte la caresse furtive de l'humain passant par là.
Perdu dans les méandres du roman de Jonathan Coe dont je termine la lecture, j'écoute le pépiement des oiseaux, j'absorbe l'immensité du bleu sans nuage au-dessus de ma tête. Je songe à l'absurdité de ce monde et des gens qui l'habitent, l'abîment, le contemplent et le façonnent. L'imaginent, le réinventent, le réparent.
Je songe à la dame qui a sonné chez nous pour nous offrir deux parts généreuses d'un gâteau aux pommes. C'est la troisième fois qu'elle nous gratifie de ses talents de pâtissière. Mon homme l'a dépannée il y a quelque temps déjà. Il a d'ailleurs dépanné informatiquement, gracieusement, la moitié des gens gentils du quartier et je bénéficie de leur reconnaissance par ricochet. Ce matin, notre épicier Jo, a donné à la petite Kimberley deux fraises dont elle s'est pourléché les babines. En d'autres occasions, un kilo de chocolats, un panier garni de fruits, un panettone, des tiramisus maison au Kinder Bueno et d'autres gourmandises pour le remercier d'un téléphone réparé, d'une connexion retrouvée, de l'installation d'une caisse enregistreuse, de l'ordinateur de Jackie, la sœur de la sœur de Jo, qui nous a invités chez elle et cuisiné un couscous maison à se taper le cul par terre.
La gentillesse, le savoir-vivre, ne sont pas pas encore tout à fait carapatés avec l'époque qu'on afflige à tort de tous les maux. L'époque a bon dos, on se trompe de cible.
Il est temps de regagner mes pénates, mettre en forme ce billet de blog foutraque, profiter de ma journée de repos dans ma position préférée (horizontale), tour à tour marmotte, paresseux ou ours. Et comme le hasard fait bien les choses, c'est avec Joëlle notre voisine et amie de palier que je rejoins nos appartements. Elle aussi avait eu la bonne idée de passer par le parc. Nous papotons, nous projetons une virée en Ardèche pour son anniversaire. Nous prenons congé l'un de l'autre et je retrouve la petite Kimberley jamais avare d'allégresse.
Qu'on la sorte pour satisfaire ses besoins ou pour la promener, qu'on lui donne sa part de croquettes ou un bout de banane, qu'on prenne quelques minutes de notre temps si précieux pour jouer avec elle, elle exprime une joie pure et sans pareille. Je me dis souvent que le monde gagnerait à exprimer son contentement, comme notre chienne, pour les choses les plus simples du quotidien.