Pourquoi prendre le temps d’écrire un billet sur une série qui m’a déçu alors que je préfère toujours parler de ce que j’aime ? Parce que je ne suis pas content d’avoir été déçu mais aussi parce qu’autour de moi, tout le monde aime. L’engouement est suffisamment fort pour que je perçoive bien le risque de me faire déchirer sur Twitter avec mon avis à contre courant. Donc il vaut mieux l’expliquer. D’autant que ça ne changera rien au fait que ce sera un beau succès d’audience pour Netflix et que je me laisse le droit de retrouver la flamme en saison 3.
Il se passe un truc horrible. Alors que j’avais trouvé la saison 1 de #SexEducation fraîche, courageuse, agréable… je viens de m’ennuyer devant les 2 premiers épisodes de la saison 2 que je trouve caricaturaux et assez mal faits. Je m’auto ok boomerise de ce pas et j’y retourne pic.twitter.com/vEvtkdu3pn
— Eric Maillard (@PRland) January 17, 2020
Attention, ça va être plein de spoilers donc ne lisez pas si vous avez l’intention de regarder. Et si vous avez moins de 16 ans, filez ranger votre chambre, ça va forcément parler de cul par ici…
J’avais aimé la première saison. Elle réussissait l’exploit d’avoir trouvé la mécanique parfaite pour que le sujet du sexe qui occupe 99% des conversations ne soit pas caricatural. Une dimension éducative courageuse au passage puisque la série n’hésitait pas à traiter tous les sujets de façon assez frontale. Retrouver Gillian Anderson dans un personnage à des années lumière de la Scully de X Files était un plaisir. Tous les personnages avaient une place légitime et existaient même quand traités un peu vite.
Tout ce que j’ai aimé dans la première saison, je ne l’ai pas retrouvé dans la seconde. Pas du tout au début, à peine plus après les 2 premiers épisodes ratés.
Tout d’abord, je comprends bien qu’il faut renouveler les storylines, sortir du principe de consultation en sexologie par un gamin de bon conseil bien qu’inexpérimenté. Mais dès lors, le fait de faire vivre le sujet de la sexualité sans un fil conducteur consistant donne ce sentiment bizarre que 99% des préoccupations des personnages sont sexuelles, pas que chez les adolescents d’ailleurs. Les 1% restant sont pour la drogue et l’alcool, présentées comme des fléaux que les jeunes combattent. Admettons, à 16 ans, on ne pense qu’au cul et on se bat contre les grands qui consomment de la drogue. Soit.
Ensuite, la série continue à avoir le courage de parler d’un sujet rarement traité aussi frontalement. Mais quand même, il y a des ratés. Le problème d’érection visible d’Otis dans les premiers épisodes est assez ridicule dans son traitement (pourquoi ne pas tenter un slip ou un boxer ? Non mais sérieusement ?). Par ailleurs, la série est créditée d’aller encore plus loin cette saison. Certes, il est question de lavement avant un rapport anal mais pour une fois le sujet est relativement masqué (à part des schémas sur un tableau) par une conversation parallèle. Autre exemple, lorsqu’un doute sur le port du préservatif pendant un rapport est traité, il renvoie au risque pour la demoiselle de tomber enceinte (pilule du lendemain), pas du tout au risque d’IST qui devient d’un coup un non sujet… Bref, la dimension pédagogique est un peu laissée de côté.
De nouveaux personnages font leur apparition, en particulier Rahim qui retient notre attention puisqu’il est français. On aime son interprète Sami Outalbali qu’on a vu évoluer dans Les Grands et cartonner dans Mortel, il fait le job malgré un rôle ingrat à défendre. On a envie de connaitre plus son histoire, ce qui l’a rendu aussi à l’aise avec sa sexualité. J’ai l’impression d’un personnage plein de potentiel mais gâché, comme lâché en cours de route. Frustrant. Le (nouveau) personnage Ola Nyman est à peine mieux traité. Il ne fait pas bon être nouveau venu dans l’aventure.
Otis aime Maeve qui aime Otis mais leurs planètes ne s’alignent pas. Jean aime Jakub qui aime Jean mais leurs planètes se désalignent. Ces arcs narratifs dignes de comédies romantiques des années 90 s’étirent en longueur, beaucoup trop. Ca a fini par m’ennuyer.
Il reste quelques points positifs : parmi les nouveaux personnages, le méchant de la saison en fauteuil roulant est aussi ambigu que celui de la saison précédente. Quelques sujets sont traités finement tel que le sentiment d’insécurité qui peut (ne pas) s’exprimer de façon perfide. Je continue à aimer Gillian Anderson même si elle en fait parfois des tonnes, la franco-britannique Emma Mackey est parfaite, Ncuti Gatwa est énervant et attachant comme on aime. La relation d’Otis à son père (qui souffre forcément d’addiction sexuelle pour être dans le ton) m’a plutôt ému. Les relations d’un fils avec ses 2 mères également.
Et enfin, coup de chapeau à l’équipe de com de Netflix qui a déployé un dispositif courageux, efficace, presque plus puissant que la série. Voir en particulier ce manuel.