« La question « qu’est-ce qui t’a été le plus utile ? » :
Le professeur Chris Argyris a forgé l’expression « apprentissage en double boucle », il y a plus de quarante ans. Si la première boucle consiste à essayer de résoudre un problème, la seconde consiste à créer un moment d’apprentissage au sujet de ce problème. C’est lors de cette seconde boucle que les gens prennent du recul et comprennent. Ils créent de nouvelles connexions. C’est alors que se produisent les moments Eurêka.
Votre mission, en tant que manager ou dirigeant, est d’aider à susciter ces moments d’apprentissage. Pour y parvenir, vous avez besoin d’une question qui favorise cette double boucle d’apprentissage. Cette question est : « Qu’est-ce qui t’a été le plus utile ? » (…)
« Pour apprendre, réactivez »
Une idée connexe vient du monde de la psychologie et plus particulièrement de l’excellent livre Mets-toi ça dans la tête ![1] de Peter Brown, Henry Roeidger et Mark McDaniel. Les auteurs sont des professeurs de psychologie reconnus et, ensemble ils ont rédigé un condensé utile de toutes les meilleures stratégies et tactiques d’apprentissage. La tactique principale qu’ils présentent met l’accent sur le fait de réactiver les informations. Ils le disent ainsi : « Il est essentiel d’interrompre le processus d’oubli. » Le processus d’oubli commence immédiatement ; en posant des questions à la fin d’une conversation, vous introduisez donc la première interruption du processus qui conduit à « Je n’avais jamais entendu ça auparavant ! »
Pourquoi « Qu’est-ce qui t’a été le plus utile ? » se trouve-t-il en haut de la liste ?
Cela suppose que la conversation a été utile
Winston Churchill disait ceci : « Les hommes trébuchent parfois sur la vérité, mais la plupart se redressent et passent vite leur chemin, comme si rien ne leur était arrivé. » Cela se vérifie aussi pour les conversations que vous avez avec votre entourage. Elles contiennent souvent du savoir, mais seulement si vous prenez le temps d’aller le chercher. La question d’apprentissage fait tout de suite prendre conscience que quelque chose d’utile vient de se produire et crée l’opportunité de le dégager et de l’identifier.
Cela incite les personnes à repérer ce qui leur a été le plus utile
En général, quand on donne du feedback, il vaut mieux en faire moins que trop. Si vous faites une liste de 12 choses à améliorer, n’importe qui se sentira dépassé. Il est plus efficace de chercher LE gros morceau – celui qui vaut vraiment la peine d’être retenu.
Cette question aidera réellement la personne à se concentrer sur les un ou deux apprentissages à tirer de la conversation.
C’est propre à chacun
En ajoutant « ce qui t’a été le plus utile », on rend la question plus personnelle, plus subjective. C’est le moment où vous aidez votre interlocuteur à créer de nouveaux circuits neuronaux.
Et bien sûr, les gens se disent à eux-mêmes ce qui leur a été utile, plutôt que ce soit vous qui leur disiez ce qu’ils doivent retenir. Ce que nous nous disons résonne toujours en nous comme un bien meilleur avis. »
Pouvez-vous repérer des occasions formelles ou informelles d’utiliser cette question ? Par exemple pour conclure un échange avec un collaborateur ou pour démarrer votre prochaine réunion d’équipe ? Vos collaborateurs seront peut-être un peu surpris, forcez-vous à leur laisser du temps pour réfléchir et ne leur soufflez pas « la » réponse même si c’est parfois très tentant ! Votre patience sera récompensée !
[1] Peter Brown, Henry Roediger, Mark McDaniel, Mets-toi ça dans la tête !: Les stratégies d’apprentissage à la lumière des sciences cognitives, Markus Heller, 2016.