Je ne sais plus si je vous en déjà parlé mais je m’appelle Gaston.
Enfin, en quatrième prénom, derrière André et Yvon, comme le veut l’hommage aux grands-pères. Et je me demande dans quelle mesure cette facétie parentale n’a pas joué le rôle d’une fée penchée sur mon berceau.
Car, en plus d’une maladresse certaine j’ai été pourvu d’un tempérament gaffeur.
Avec l’âge, je suis parvenu à contrôler le phénomène, mais au prix d’une vigilance de tous les instants.
J’ai également toujours peur de me mettre à faire quelque chose de délibérément stupide insultant ou dangereux. J’ai appris récemment que nous étions quelques uns dans ce cas ;cela a pour nom phobie d’impulsion et Gaston n’y est pour rien.
Quoiqu’il en soit cette crainte permanente de l’impair participe à une certaine rigidité de maintien que quelques uns d’entre vous ont peut-être eu l’occasion de constater in vivo.
Deux ou trois verres suffisent à assouplir un peu le bonhomme mais fragilisent aussi les digues et il arrive qu’elles cèdent, libérant alors les gaffes en pagaille qui dévalent lourdement en un éboulement de boules de bowling.
Enfin peut-être pas tout à fait mais c’est l’impression qui m’assaille certains lendemains en tête de bûche, ajoutant l’angoisse et la honte aux céphalées.
En fait c’est même un sentiment – le souvenir d’impairs – qui peut m’attaquer à tout moment tout endroit. Je pense que ça me ferait du bien d’en parler mais le temps presse et votre patience s’use.