(Note de lecture) Désordre, de Leslie Kaplan, par Christophe Esnault

Par Florence Trocmé


Mise à mort du pouvoir par la jubilation même

Des crimes sauvages surviennent simultanément en ville comme en campagne. Tous sont dirigés contre des patrons et ceux pour qui celui qui se plaint de ses conditions n’a qu’à ceci et n’a qu’à se bouger un peu.
Fracasser le crâne de celui ou de celle qui incarne le pouvoir, qui n’en a pas rêvé ? Qui n’y a pas pensé en diverses situations ?
Violence sociale, économique, institutionnelle…  Absence de pénibilité au travail… Les N’a qu’à quand ils cessent de subir pour passer à l’action rageuse et spontanée retrouvent le sens à leur vie que l’on leur a confisqué, comme on confisque le langage, en premier lieu, pour imposer le reste (les autres violences).
Exploités en tout genre, ouvriers, camionneurs, femmes de ménage, portier, manutentionnaire, étudiante, deviennent ici, des assassins héroïques. La violence, ce n’est pas eux !!
Ce que l’on voit écrit sur le dos de certains gilets jaunes, ce qu’on entend crier dans les manifestations, ce qui hurle chez des gens sans voix, sont peut-être une diversité de paraphrases de celle de Leslie Kaplan : Ça suffit la connerie !  
Dans ce texte, très naturellement, on ne mange pas, on ne respire pas, on ne dort pas, ON RIPOSTE. Et c’est jubilatoire !! On repose le livre, la violence a opéré une circulation saine, la vraie a été éloignée le temps de la lecture, on se sent mieux.
Christophe Esnault

Leslie Kaplan, Désordre, POL, 2019, 58 p. 7 €
sur le site de l’éditeur, P.O.L., avec l’habituelle vidéo autour du livre.