Au début, une startup américaine, Marqeta, a eu l'idée de développer le principe d'une émission de carte de paiement à la demande, pilotée par API. Cinq ans plus tard, le reste du monde commence à en percevoir le potentiel. Après l'entrée en piste de Stripe et quelques autres, c'est au tour de Natixis de dévoiler sa solution Xpollens.
Conçue en collaboration avec Visa, la nouvelle offre propose aux jeunes pousses de la FinTech désireuses d'enrichir leur catalogue, aux commerçants souhaitant déployer leur propre instrument de paiement, aux entreprises en mal de contrôle des dépenses professionnelles de leurs collaborateurs… de définir le produit qui leur convient, simplement et rapidement, avec un maximum de flexibilité, en bénéficiant du professionnalisme d'une institution financière de premier plan.
Xpollens fournit ainsi une palette de services complète, comprenant la création de cartes physiques et virtuelles, avec design personnalisé, la gestion de plafond et de budget, le suivi des dépenses en temps réel, les traitements de base (autorisation, compensation, change, lutte contre la fraude)… Sont également prévus quelques fonctions additionnelles, telles qu'une option de conciergerie, un porte-monnaie virtuel, les virements et prélèvements, les échanges P2P… qui débordent du cadre de la carte.
Avec un tel assortiment, peut-être vaut-il mieux comparer le dernier bébé de Natixis à Treezor et sa plate-forme de « banque as a service » (accessible aussi par APIs, bien entendu), désormais partie intégrante du groupe Société Générale (depuis septembre 2018). La différence serait alors, s'il faut en croire la communication officielle de Xpollens, son agilité et sa réactivité incomparables, face à un modèle relativement traditionnel, dont l'immobilisme des derniers mois était justement questionné il y a peu.
Il semblerait cependant qu'il reste du chemin à parcourir pour parvenir au niveau de flexibilité qu'on attendrait de nos jours. Par exemple, quand Marqueta promet une intégration qui ne se mesure plus en mois mais en jours, Xpollens se contente prudemment d'affirmer être en capacité de co-construire avec ses clients une solution en moins de 100 jours. Non seulement le délai annoncé paraît-il long mais, surtout, il laisse entendre qu'une approche « sur mesure » et non « à la demande » est privilégiée.
L'impression négative est renforcée par l'absence sur le site dédié des fondements d'une plate-forme moderne, à savoir une documentation des interfaces mises à disposition des développeurs et un « bac à sable » qui permettrait de les tester. Il est évidemment fort possible que l'offre soit encore en cours d'élaboration (comme celle de Visa, dont on peut supposer qu'elle en constitue l'ossature), mais, dans cette hypothèse, il serait utile de le préciser, d'autant que les premiers clients devront essuyer les plâtres.
En attendant une véritable industrialisation, qui autorise une mise en œuvre facile et quasiment instantanée, Xpollens ne pourra atteindre qu'une frange très limitée de sa cible, les entreprises qui ont effectivement besoin d'un produit à façon, méritant de consacrer des ressources conséquentes à sa fabrication. En revanche, pour celles, les plus nombreuses, dont les usages seraient plus opportunistes, il faudra impérativement un dispositif léger, aussi aisé à intégrer qu'un plan Google Maps dans une application web.