Il était impossible de conclure cette année 2019 sans dire le bien que j’ai pensé que des ces deux albums.
La première édition,
couverture souple, avec rabats.
Je n’avais pas encore eu l’occasion de m’exprimer sur cette version, parue la même année chez Comics USA, et pourtant achetée au début des années 2000, pour compléter une collection de l’oeuvre du papa de Hellboy, alors en pleine ascension.
N’oublions pas que le personnage de Hellboy n’est apparu qu’en 1994 en TPB aux USA et que son premier album français a été édité par Dark Horse France dés cette année. Ce n’est seulement vraiment que lors de la reprise du catalogue par les éditions Delcourt que la série a été redécouverte pas un plus large public, et ce seulement en 2001.
Dracula était donc, en ce début des années quatre-vingt-dix, une des rares occasions de lire et déguster les planches de cet auteur qui est devenu une figure incontournable du comics indépendant depuis. A l’époque, seul « Le Cycle des épées », tout comme «Iron Wolf » (Zenda), « Jungle Saga » (Marvel France) étaient disponibles, ainsi que son « Aliens Absolution » chez Dark Horse France. Autant dire que chaque parution était guettée avec avidité.
Une version grand format noir et blanc a été proposé en 2018 par les éditions Delcourt, afin de faire encore davantage ressortir le trait du dessinateur. L’occasion pour les amateurs de se faire encore plus plaisir, même si cette présente édition, format comics, mis en couleur par Mark Chiarello mérite déjà le détour. D’autant plus qu’ont été ajouté en fin de volume 11 pages de crayonnés issus de la collection de l’encreur John Nyberg et les originaux des couvertures, encrés.Notons que la traduction a été refaite, passant de celle de Janine Barucha (1993) à celle d’Hélène Remaud-Dauniol. Du beau travail de réédition, bienvenu évidemment, 26 après sa première publication.
Pour faire très rapide, je dirais que Davy Mourier est de la génération (ou de l’école plutôt) Canal Plus et sa culture grand guignolesque se retrouve de fait très attachée aux média, pour ne pas dire la télévision. Ce qui ressort pleinement dans ses travaux, (je choisi le mot exprès), plus que dans des « bandes », parce que pour moi, l’auteur a plus à voir avec les médias que la bande dessinée à proprement parler.
Ses précédentes parutions, soit dans des anthologies, soit des petits formats thématiques ne m’ont en effet pas donné à me faire une idée d’auteur classique. Et la collection VS, chez Delcourt lui correspond finalement plutôt bien.
Bref, c’est avec surprise, mais intérêt et dans une certaine expectative que j’ai abordé ce « Souvivants », réalisé avec Edouard Cour aux dessins. Son style infographique noir et blanc très cadré, à la fois très propre et minutieux avait cependant de quoi inquiéter (je suis un peu de l’ancienne école, et oui), mais celui-ci propose au final suffisamment de détails et de textures pour ne pas paraître froid et ennuyeux. Dont acte.
Là dessus, les dialogues sont nombreux, et on comprend très vite que l’humour va être basé à égale proportion entre le comique de situation (et d’expressions) et le comique verbal. Mourier a son chic pour faire de longues phrases, qui, placées dans la bouche d’un gredin comme semble l’être Michel Martinez - commercial bien vivant de son état, un peu fort, moustache au vent et cerveau en berne - font mouche. Michel donc, qui, s’arrêtant faire le plein au beau milieu d’un massif montagnard, réalise qu’il vient de tomber dans un lieu oublié de la civilisation, où une troupe de gens, sûrement très bien avant, s’est transformée en zombies. En fuyant à travers bois, il parvient à se réfugier dans la seule bicoque présente, celle habitée par Jean-Philippe le Foc (sacré jeu de mot) et son petit clébard Sucette (re). Tous deux (trois?) vont devoir apprendre à se connaître, pour survivre.
En 74 pages, le duo d’auteurs parvient à nous faire rire, tout en maîtrisant une tension palpable, même pas due aux méchants présents dehors, finalement assez inoffensifs. Tout est dans la relation humaine entre ces deux types que tout oppose, et que le prétexte du film de zombie va amener à mieux se connaître, jusqu’à envisager l’aventure, la grande (avec un grand A). Du coup, on serait parti pour un tome deux que cela ne dérangerait personne, même pas moi.
Pari gagné ! (et pour moi Davy Mourier signe là sa meilleure publication, mais cela n'engage bien sûr que votre serviteur.)
FG
« Dracula » par Roy Thomas et Mike Mignola
« Les Souvivants » par Davy Mourier et Edouard Cour
Éditions Delcourt (15,95 €) - ISBN: 978-2-413-01851-3