Cristaux de songes est un recueil d'une cinquantaine de textes, de deux à trois pages, tout au plus. Ces textes parlent des joies et des peines, des jours et des nuits, dont la vie de personnes de tous âges est faite en ce monde.
L'emploi des mots cristaux et songes dans le titre est bien trouvé parce que la brièveté est exigeante. Il faut en très peu de lignes cristalliser une histoire en excitant son imagination, puis inviter le lecteur à en combler les lacunes.
Ces histoires se caractérisent par le dévoilement d'une intimité, puisque dans chacune d'elles le lecteur accède aux pensées de celles ou de ceux qui en sont les acteurs. Leurs situations banales en deviennent singulières.
Dans ces pensées il y a souvent des choses que l'on ne peut, ou ne doit pas, dire, qui demeurent donc au fond de soi. Elles contribuent à l'apprentissage et au for intérieur, qui se font à la faveur d'échecs et de réussites.
Le côté obscur de ces textes, ce sont les amours enfuies et attentes déçues, les humiliations et frustrations, les peurs et occasions manquées, les vieillissement et deuil, les apparences trompeuses et promesses non tenues.
Leur côté lumineux, ce sont les plaisirs charnels (la tétée, le bain, la jouissance involontaire...), les désirs et soulagements, les parfums et beautés naturels, les réelles métamorphoses et les surréalités nées de l'esprit.
La conclusion de la première d'entre elles, Sommeil, prépare au microcosme libératoire de Catherine Dubuis, qui est le sien bien sûr, mais en lequel tous ceux et toutes celles qui écrivent se reconnaîtront, peu ou prou:
Qui sait? A force de les ignorer, ces histoires, surgies à la marge du sommeil et de la veille, se lasseront peut-être d'envahir mon esprit. Ou alors, un beau matin, oui, très beau, je trouverai l'énergie d'enfin les coucher, comme des femmes, dans le lit blanc d'une page blanche.
Francis Richard
Cristaux de songes, Catherine Dubuis, 128 pages, L'Aire