Maureen Jenkins, « la tête hors de l’eau »

Publié le 17 décembre 2019 par Etvsport @etvsport

Parce que c'est le sport le plus dur de la vie entière (rires) ! Je trouve cela dommage que l'on ne parle pas plus de la natation synchronisée car du coup beaucoup de gens ne connaissent pas et ne savent ce que c'est. C'est une discipline où on s'entraîne et on s'investit énormément et franchement elle mériterait d'être plus connue.

Forcément, on en parle dans l'équipe et parfois on est dégoûtée car on voit d'autres sports qui sont médiatisés alors que souvent ils s'entraînent beaucoup moins que nous. Honnêtement, si déjà on avait le droit aux championnats du Monde à la télé, cela serait une réussite.

Tu as pu participer au tournage du film de Gilles Lelouche " Le Grand Bain ", peux-tu nous en parler ?

Les acteurs sont venus à la piscine et nous ont demandé de leur apprendre à faire de la " synchro ". Ils se sont retrouvés dans l'eau et c'était assez drôle car certains ne savaient pas très bien nagés et il y en avait même un qui avait peur de l'eau. C'était pas facile pour eux et nous leur avons monté la chorégraphie de fin de film. On l'a inventé, on leur a montré et cela leur a plu.

Au début, on a essayé de leur apprendre à sec, c'est-à-dire que l'on mimait nos jambes avec nos bras et on échangeait beaucoup avec eux. Puis il y a eu des doublures qui ont fait les jambes, pas nous, car nous avons les jambes trop fines même si une de mes coéquipières, Marianka, l'a fait pour un des acteurs. Concernant la chorégraphie, c'est quelque chose d'extrêmement simple pour nous, c'était basique. Néanmoins, il a tout de même fallu faire venir des doublures. A la fin, ils nous ont remercié et étaient impressionnés par la difficulté de la natation synchronisée.

Et la " synchro " pour les hommes, tu en penses quoi ?

Cela dépend de comment c'est fait (rires). Je pense que la natation synchronisée, cela pourrait devenir un sport masculin car les hommes ont beaucoup de puissance. On a notamment pu le voir avec les acteurs lors des phases de portée où il pouvait envoyer plus haut un coéquipier que nous entre filles car ils ont plus de force. Si nous, on accentue le côté " grâce ", on peut imaginer qu'ils fassent des chorégraphies beaucoup plus masculines et cela pourrait être top. Par exemple, aux championnats du Monde, il y a une épreuve de duo mixte. C'est l'une de mes préférées et c'est super à regarder. D'ailleurs si quelqu'un veut devenir mon partenaire de duo mixte, je suis tout ouïe (rires).

Y a-t-il des pays où la natation synchronisée est très populaire ?

Déjà, si on est honnête, dans la plupart des pays, c'est plus populaire qu'en France (rires). En Russie par exemple c'est extrêmement populaire. Elles sont championnes olympiques donc cela aide forcément mais c'est également culturel. Elles débutent à 3 ans et directement au haut niveau alors que moi, j'ai commencé à 7 ans et comme loisir. Mais si on regarde en Espagne, un pays que l'on peut comparer à la France, toutes les compétitions (Coupes du monde, Mondiaux, championnats d'Europe) sont diffusées sur la télévision espagnole. Ma famille, qui est en Espagne, voit toutes mes compétitions alors que ma mère et mon père, ils ne voient rien car en France, ce n'est pas jamais diffusé. En plus au niveau mondial, on n'est pas loin car on est 9ème et les Espagnols 6ème.

Comprends-tu pourquoi l'école russe est la meilleure au monde ?

Oui car j'ai pu faire deux stages là-bas notamment un qui suivait les championnats de Russie auxquels j'avais participé. Moi j'arrive en tant que championne de France et je termine 80ème donc je me dis qu'il y a un truc qui ne va pas. Etant donné que c'est une discipline connue sur le sol russe, il y a forcément plus de pratiquants et donc plus de concurrence. Et puis la grosse différence, c'est que c'est un sport professionnel en Russie. Elles font que cela, même pas d'études alors que nous, on doit suivre un cursus scolaire car à la fin de notre carrière, il faut que l'on trouve un travail.

Participer aux JO de Tokyo puis à ceux de Paris, ce sont les deux gros objectifs de ta carrière ?

Oui ! Cela fait depuis 2000 que la France n'est pas qualifiée en équipe aux JO. Cette année, on a la chance de pouvoir se qualifier pour Tokyo 2020, on doit juste battre une seule équipe. Ensuite, pour Paris 2024, cela sera différent car on est d'ores et déjà qualifiées en tant que pays hôte. On aura l'objectif de faire une grosse performance et de pourquoi pas se rapprocher du podium.

Ton père t'a parlé des Jeux Olympiques et de ce qu'il avait ressenti en 1984 à Sarajevo ?

En vrai, il ne m'en a jamais trop parlé ! Il m'a quand même dit que c'était une expérience hors du commun et qu'il s'en souviendrait toute sa vie. Il n'avait pas vraiment les mots pour l'expliquer et m'a simplement dit que je devais les vivre par moi-même et que je comprendrais à mon tour.

Une carrière, cela dure combien de temps en natation synchronisée ?

A partir de 26 ans, il est temps d'arrêter ! A ce moment-là, le corps peut dire stop mais c'est surtout le mental qui lâche car on s'entraîne 9 heures par jour, de 40 à 45 heures par semaine. Et c'est toujours pareil, vu que l'on est pas professionnelle, difficile d'aller plus loin que 25 ans.

Comment gères-tu tes réseaux sociaux et notamment Instagram ? Quelle image souhaites-tu renvoyer ?

Je trouve cela important comme tout le monde ! Au début, ce n'était pas forcément naturel de poster car je voulais réservé cela à mes amis et ma famille. Après, pour faire connaître la " synchro ", il faut s'en servir assez souvent et j'aime bien montrer mon quotidien et la difficulté de performer dans cette discipline. On se réveille tôt, on termine tard...Et forcément, des gens te suivent et t'encouragent donc cela fait plaisir.

Concernant mon image, ce qui est important c'est que cela me ressemble et que je reste la plus naturelle possible.