Peu importe où nous sommes, d'Antoinette Rychner

Publié le 14 décembre 2019 par Francisrichard @francisrichard

Antoinette Rychner dédie Peu importe où nous sommes à ses fils:

Au vaillant Aloys,

à Benjamin, le dernier né.

L'histoire vraie de ce livre est la survenance, un jour de septembre 2018, de la leucémie de Burkitt qui frappe son aîné de cinq ans, alors que son frère n'est encore qu'un bébé de trois mois.

Le tutoiement que l'auteure emploie dans son récit s'adresse à son dernier né, pour que, sans doute, il sache un jour ce qui s'est passé et combien il aura compté pour elle dans ces moments difficiles.

Le plus difficile dans de telles circonstances est l'incertitude qui précède le diagnostic, puis l'organisation à mettre en place, enfin la nécessité de tenir le coup alors qu'il y a tant à faire.

Les solidarités naturelles ne leur font pas défaut à elle et au père: nombreuses sont les personnes qui vont les aider. Et, quand le père ne peut être là, elle trouve en elle le ressort pour tenir.

Car une routine finit par s'installer. Le père passe les nuits avec le grand frère à l'hôpital. Elle dort avec le dernier né dans la maison de famille qui se trouve à proximité. Ils ne font que se croiser:

Nous n'avons d'autre possibilité que de reléguer le relationnel, l'émotionnel ou nos prérogatives de couple à notre vie future.

La chimiothérapie doit durer six mois, c'est-à-dire au total six cures. Le temps passe. L'hôpital et les personnes qui s'y trouvent, personnel médical, patients, familles, lui deviennent familiers.

Aussi, quand la petite famille est autorisée à rentrer chez elle pour un premier congé d'un jour et demi, avant la troisième cure, se sent-elle incapable de s'occuper seule du petit malade.

Le même désarroi se manifeste lorsque le deuxième congé, d'une durée de plusieurs jours cette fois-ci, est autorisé pour préparer les fêtes de fin d'année à la maison. L'auteure alors s'alarme:

Je ne sais comment appréhender autant d'autonomie; j'ai peur de tout repenser; peur du changement tout simplement.

Quinze jours avant Noël, après la quatrième cure de chimiothérapie, son compagnon et elle doivent faire face à une nouvelle libération, de vingt jours consécutifs, autant dire un siècle...

Ils ne sont qu'à mi-parcours et elle n'en peut déjà plus. Ils ne sont d'ailleurs pas au bout de leurs peines, car les problèmes de santé sont imprévisibles et les font passer par des hauts et des bas:

Moralement, nous avons besoin de nous accrocher à une échéance même conditionnelle.

Ils sauront affronter les choses et le médecin reconnaîtra l'effort extrême que lui aura coûté leurs batailles, ce qui irriguera longtemps son auto-estime et sa confiance en ce que peut [sa] famille.

A l'issue du protocole, si la maladie n'est plus détectable, on parle de rémission. Après cinq ans sans récidive, de guérison, leur a-t-on dit au début de ce parcours de septembre 2018 à février 2019...

Francis Richard

Peu importe où nous sommes, Antoinette Rychner, 160 pages, éditions d'autre part

Livres précédents:

Le prix, Buchet-Chastel (2015)

Devenir pré, éditions d'autre part (2016)