Je suis rentrée de Berlin en juillet 2015 et j'ai dû présenter ma carte d'identité au retour pour justifier que j'étais bien la propriétaire du billet d'avion que j'avais entre les mains. Jusque là rien d'anormal.
De retour chez moi, j'ai défait la valise, lavé le linge sale, rangé au fur et à mesure et poursuivi une vie normale. Jusqu'à ce qu'on me demande mes papiers pour je ne sais plus quelle raison. Plus de carte, ni dans le portefeuille, ni dans le sac, ni dans la valise que j'étais retournée investiguer. Plus de carte nulle part.
Je n'ai vu qu'une explication : je l'aurais laissé tomber à l'aéroport et là, le film se construisit vite dans ma tête, elle ne sera pas perdue pour tout le monde. Je dispose d'un passeport et je peux facilement me passer de cet objet mais je ne souhaite pas qu'on puisse en faire une utilisation frauduleuse et m'imputer une mauvaise action. J'imaginais qu'elle était déjà entre les mains d'une terroriste. Je décidai donc de déclarer la perte au commissariat.
Ce fut long et ardu. Mes craintes ne motivaient pas l'agent de sécurité, une femme persuadée que j'allais la retrouver dans les jours qui suivraient et que je lui faisais donc perdre son temps. Il me fallut drôlement insister. J'avais raison. Le document est resté introuvable.
Un an passa. J'entrepris avant-hier, pour des motifs que je ne vais pas raconter, une opération de grand ménage. Elle consista notamment à déplacer des dizaines de livres d'étagères vers d'autres étagères. Me voilà perchée sur un escabeau pour placer en hauteur ceux que j'avais déjà lus (et chroniqués) en veillant à isoler ceux qui restaient à découvrir. Cette fameuse PAL (Pile A Lire) que chacun voudrait voir baisser se mit à grandir furieusement et se trouva en équilibre précaire.
En cherchant à la redresser pour éviter que les bouquins ne fassent une dangereuse dégringolade (je suis d'un naturel très soigneux à l'égard des livres) ma main a heurté la série "déjà lus" qui s'est éparpillée en vol plané sur le parquet.
L'un d'eux s'est ouvert, libérant sa provision de marque-pages (je ne tire pas de trait dans les marges, ne surligne jamais, n'écris aucune annotation, même au crayon de papier, mais je glisse une profusion de cartes d'invitations, billets de théâtre, de métro aussi pour retrouver les endroits que je cite dans mes chroniques). Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir, presque un an et un jour plus tard ... ma carte d'identité.
Le titre du livre ? Cela ne s'invente pas : La vie par effraction.
J'ai voulu relire l’article que j'avais rédigé. Impossible de le trouver sur le blog. Lui aussi je l'avais oublié alors que j'étais certaine d'avoir terminé (et apprécié) ce recueil de nouvelles que je lisais le soir à Berlin. C'est donc doublement que je viens d'être rappelée à l'ordre.
C'est fait. Je peux cocher la case : J'ai perdu ma carte d'identité
Texte précédemment publié le 21 août 2016 sur la page A bride abattue de Facebook - rubrique "articles"