L’équipe de France est championne du monde. Toute la France est en liesse, les enfants de la banlieue font la fête sur les Champs Élysées.
Et puis la vie reprend son cours. Un père vient rechercher son fils au commissariat de Montfermeil. Ce n’est certes pas le père d’un des quatre bacheliers de Georges Brassens. Et on comprend que l’enfant n’ait pas envie de rentrer chez lui. Mais avec qui peut-il se sentir bien dans ce monde où toute l’organisation sociale est partagée entre divers groupes ? La police, les caïds (grands frères), l’imam qui tient un kebab… Les plus petits, qui les écoute, qui les entend ? Un cirque s’installe dans le quartier. « C’est pour vous qu’on vient ici », dira en substance le patron du cirque. Qui a imaginé que ce cirque répondait à l’attente des habitants ? Nous savons aujourd’hui que la plupart de ces cirques n’ont que peu de respect pour les animaux qu’ils transportent d’une ville à une autre dans des conditions lamentables. En emportant un lionceau, l’enfant se libère lui-même des barreaux. Et ce qui est qualifié de vol va bouleverser l’organisation et les arrangements des uns et des autres. Jusqu’à ce qu’un policier tire et blesse au visage l’enfant.
Ladj Ly nous fait entrer dans le film par l’équipe de la BAC. Et son film a donc l’aspect d’un polar. Mais, c’est dans le regard des enfants que tout se joue. Des enfants qui prennent la place, qui prennent les risques, qui regardent les adultes, qui prennent de la hauteur, mais que la société, dans son partage des pouvoirs, rejette. Ce que montre le réalisateur, c’est que ces enfants sont les enfants de cette société, qu’ils en connaissent les codes et en font l’usage qu’elle leur a appris. Jusqu’à la violence : violence des groupes entre eux, violence policière, violence de l’argent, maltraitance familiale…
On sort de ce film abasourdi, la tête emplie de cris de joie devenus cris de désespoir.