Téléphone caleçon
Aux jeux des amours et des hasards contemporains, c'est une question qui se pose : mais au fait, pourquoi des hommes se photographient-ils les bas morceaux avant d'intégrer ces images à leurs correspondances galantes ? Selon un sondage YouGov de 2017, du côté des émetteurs, le phénomène des dick-pics (« photos de bite », dans la langue de Molière) concernerait 27% des hommes de 19 à 39 ans et, du côté des destinataires, 53% de leurs homologues féminines. Si on y réfléchit trois secondes, il ne s'agit que la métamorphose ultra-moderne d'une très vieille habitude tant, depuis que le monde est monde, le phallus et l'imagerie phallique symbolisent à la fois la masculinité triomphante et nombre de ses annexes thématiques comme la puissance, la virilité, la force et même le statut social. Par exemple, chez les Bororos du Brésil, étudiés notamment par Lévi-Strauss, plus votre étui pénien est long, plus vous êtes de la haute. Des graffitis offerts à la postérité par des soldats romains sur le mur d'Hadrien aux zizis gribouillés à la hâte et aux quatre coins de la planète sur des tables d'écoliers ou des cloisons de lieux d'aisance, l'obsession pour l'organe masculin ne date pas d'hier et n'est sans doute pas près de nous abandonner demain. Ce qui ne répond toujours pas à la question : en plus d'en avoir la possibilité technologique, pourquoi les hommes sont-ils si friands de selfies génitaux ? Pour le savoir, cinq psychologues œuvrant au Canada et aux États-Unis se sont retroussé les manches et ont conçu, excusez du peu, la première étude de l'histoire de la science à analyser, données empiriques à l'appui, les raisons et les traits de personnalité des envoyeurs de ces autoportraits très intimes. Grâce à leur échantillon de 1087 hommes hétérosexuels, où une bonne moitié étaient familiers de la pratique, les chercheurs ont pu déterminer que la motivation numéro un de ces messieurs traduisait un « état d'esprit transactionnel ». En d'autres termes, que s'ils montraient leurs parties, c'est parce qu'ils voulaient que leurs correspondantes leur rendent la monnaie de leur pièce et leur montrent les leurs, le tout non pas pour les humilier, les rabaisser, leur faire peur ou encore les oppresser, mais tout simplement pour pimenter l'ambiance et passer le plus vite possible du virtuel au réel. Malheureusement, si cela part d'un bon sentiment, l'astuce est loin de marcher à tous les coups. Pourquoi ? Parce qu'hommes et femmes n'ont, en moyenne, pas les mêmes critères en ce qui concerne leurs stimuli sexuels, les femmes étant aussi dégoûtées par l'obscénité que les hommes sont titillés par des images crues. « Cela ne veut pas dire qu'il faut accepter aveuglément ce type d'activité », tient à préciser Cory L. Pedersen, l'auteur principal de l'étude et directeur du laboratoire de recherches en sexologie scientifique ORGASM de l'université polytechnique de Kwantlen (Canada). Selon Pedersen, interrogé par Eric W. Dolan de PsyPost, ces travaux ne justifient pas non plus l'impunité des hommes envoyant de manière non sollicitée de telles images, car cela « viole le consentement ». Par contre, s'il y a quelque chose à retenir de son étude, c'est que « sans la science pour guider notre compréhension de nos comportements, nous avons toutes les chances de nous tromper sur les intentions des individus ». Comme le fait de croire que l'envoi de dick-pics traduirait de la misogynie, du sexisme, de l'hostilité ou encore un tempérament impulsif, colérique ou agressif alors, qu'au pire, elles ne sont que la traduction, là encore, d'un très archaïque et très universel trait humain : la difficulté qu'il y a à se mettre dans la tête d'autrui lorsqu'on veut le mettre dans son lit.
Mixité bien ordonnée
À l'heure où Marlène Schiappa, notre Secrétaire d'État chargée de l'égalité femmes-hommes et de la lutte contre les discriminations, travaille d'arrache-pied à augmenter la présence du beau sexe dans les emplois et secteurs professionnels les plus prestigieux, une étude sur la manière dont hommes et femmes ne collaborent pas de la même manière avec leurs congénères selon qu'ils évoluent dans un groupe mixte ou unisexe devrait être d'urgence versée à ses dossiers. Dans cette recherche, menée en Russie et rassemblant quinze expériences et 180 volontaires (dont 77 femmes), Anastasia Peshkovskaya, Tatiana Babkina et Mikhail Myagkovn, chercheurs en sciences cognitives et en mathématiques appliquées, montrent que la coopération est meilleure dans les groupes mixtes et masculins et moins bonne dans les groupes exclusivement féminins, où la défiance et la compétition sont bien plus accentuées et les échanges plus difficiles. De fait, lorsqu'elles ont affaire à leurs semblables, les femmes ont plus de chance de recourir à des stratégies de type « œil pour œil, dent pour dent », à faire preuve de bien moins d'indulgence en cas de trahison et à encourager des punitions plus sévères en cas de transgression des règles.
La der des der
L'effet dit de la « dernière tournée », conceptualisé en 1979 par le psychologue social James W. Pennebaker et ses collègues, statue que plus l'heure de fermeture du bar approche, plus vous aurez de chances d'y trouver quelqu'un à votre goût pour le ramener chez vous. Ce qui signifie, basiquement, que moins nous avons d'opportunités de choix, plus nous nous décidons vite et moins nous faisons la fine bouche. Quarante ans plus tard, une équipe dirigée par l'anthropologue Helen Fisher a voulu savoir si ce qui s'observait sur un laps de temps relativement court pouvait s'appliquer à l'échelle d'une vie. En l'espèce : est-ce que les femmes ont tendance à davantage sauter sur tout ce qui bouge lorsqu'elles approchent de la ménopause, alors qu'elles étaient plus précautionneuses et sélectives lorsque leurs ovocytes étaient plus frais ? La réponse est oui, avec un constat sans appel : seule la prise de décision sexuelle est accélérée, tout le reste de l'activité libidinale restant inchangée.