1967
7 Winchester per un massacro
Avec : Edd Byrnes, Guy Madison
C’est la fin de la guerre fratricide qui fit plus de morts que dans toutes les guerres américaines réunies. Certains sudistes ne l’entendent pas de cette oreille et taïaut taïaut, y a le fameux trésor des confédérés à déterrer.
Enzo G. Castellari jouit d’une bonne réputation dans le petit milieu du spagh pour nous avoir tourné un mémorable Keoma, un non moins mémorable mais moins connu Johnny Hamlet et un honorable Tuez les tous et revenez seuls. Pourtant, il a aussi produit d’efficaces bouses (Te Deum), un film parodique largement surestimé (Je vais… je tire… Et je reviens) et sa carrière post-western à base de film de requin mauvais mais attachant (La mort au Large) et de sous Mad Max (Les guerriers du Bronx 1 et 2) ne redore pas vraiment son blason. On n’est certes pas à l’abri d’une bonne surprise dans sa période polar qui me reste inconnue, mais le but n’est de toute façon pas de dire que l’homme n’a réalisé que deux films potables dans toute sa carrière, mais de préciser que ce n’est pas parce qu’il a tourné Keoma et Johnny Hamlet qu’il faudrait avoir une coupable indulgence pour ce 7 Winchester pour un massacre.
Le film qui commence semble pourtant loin d’être totalement mauvais : Castellari respecte le générique traditionnel à base de photos sépia avec des coups de canons dans le fond et la musique morriconesque ad hoc. On a ensuite une intro historique des plus sérieuses qui voudrait vous dire que ce film là est fait avec soin, qu’il s’inscrit dans un registre crédible dans lequel tous les détails seront étudiés avec passion et que vous allez en avoir pour votre argent. Patatras, cette intro est suivie d’une autre intro, celle des sept bandits, qui inscrit illico le film dans le registre fauché ridicule : une armée de rebelles sudiste composée d’un maniaque du fouet, d’un type qui tue ses adversaires d’un coup d’éperons dans la gorge, d’un mexicain qui a la voix de Ramon (« le cœur, vise le cœur ») et d’un indien genre village people en plus bouffi, ça remet vite les idées en place sur l’authenticité du récit.
Qu’à cela ne tienne, on prend quand même, changement d’optique, virage à 180 degrés. Retrouvons notre âme d’enfant, ces bandits sont de purs bandits de convention bien caractérisés, telle une A-team bien rôdée. L’authenticité, on s’en fiche, et là on va bien s’amuser non ?
Heuu, non, le héros arrive, c’est Edd Byrnes, il est nul, il est plat, il ne fait pas l’affaire. OK, il bastonne son monde, OK, il tire juste, OK il est taciturne, mais il manque de classe, il manque de charisme, il manque de tonus. Le réalisateur s’essaie à ses compositions picturales à base d’angles audacieux, mais ça ne suffit pas à rendre intéressant un scénario qui part un peu dans tous les sens, surtout à la fin. Le spectateur a décroché bien avant ça, lorsque confronté à une scène purement surréaliste, il se demande s’il faut rire ou prendre la chose au premier degré : les bandits décident en effet de torturer un soldat Yankee, et c’est l’Indien qui s’en charge, en lui… chatouillant les pieds avec une plume ! C’est déjà bien assez crétin comme ça, mais il faut voir en plus le yankee se tordre de douleur, il faut voir les bandits rire de leur rire très très méchant, il faut voir le héros – choqué par tant de cruauté – secourir le malheureux : « bande de salauds ! ». Cette scène ridicule a sûrement une raison, ou une histoire, mais l’âme d’enfant a bon dos dans tout ça. Faut-il avaler des kilomètres de médiocrité sous prétexte qu’on doit garder son âme d’enfant ? Non, Castellari débutait, il n’avait pas les moyens, n’en parlons plus. Le final dans les grottes ainsi que le massacre des habitants sont censés former le bouquet final d’une histoire haletante, mais aujourd’hui, ils ne forment plus qu’une convention de plus qui fait bailler d’ennui même le défenseur le plus acharné du réalisateur.
Où le voir: Seven 7 nous a sorti ça en DVD, mais le film est déjà passé sur le satellite.
PS : J.F. Giré indique dans son bouquin que le film s’inspire des exploits authentiques du Colonel Shaw et de son régiment noir, Shaw refusant d’admettre la défaite du Sud et se livrant au pillage après la guerre. Pourtant si j’en crois Wikipédia, Robert Gould Shaw est certes connu pour avoir mené un régiment de noirs, mais c’était un Nordiste et il est mort en 1863, soit avant la défaite. Si un expert en guerre de Sécession passe par là pour tirer tout ça au clair…