On apprend à tout âge. Il m’arrive de plus en plus souvent de devoir patienter. Dans l’attente de l’autre. Il y a une action à réaliser. Je pourrais la faire moi-même. Mais la réalité et la sagesse font que c’est quelqu’un d’autre qui doit la faire. Pour mille et une raisons, toutes bonnes, cela prend plus de temps que je ne le souhaiterais. Alors, j’attends. J’apprends à attendre.
Durant ma vie professionnelle, il se fait que j’ai rarement dû déléguer. J’étais plutôt du style à prendre sur moi toute une série de tâches. D’une part, les autres ne voulaient pas vraiment les faire ; d’autre part, ça me permettait d’en avoir le contrôle. Je me retrouvais dans un rôle d’adjoint dans lequel j’étais assez efficace et qui me satisfaisait pleinement comme je l’ai écrit par ailleurs.
Aujourd’hui, je ne suis plus l’adjoint de qui que ce soit, mais ayant endossé de nouvelles responsabilités, je suis plus souvent amené à déléguer ou encore à ne pas devoir faire tout tout seul. Ce n’est pas toujours évident, car les choses avancent parfois moins rapidement que je ne le souhaiterais, mais j’ai parfaitement conscience que c’est pour le bien, tant celui des autres que le mien. Notre richesse humaine est plurielle. Plus les gens collaborent, plus chacun s’enrichit des apports de l’autre. Ça prend simplement un peu plus de temps. Et encore, ce ralentissement n’a du sens qu’à court terme. Au-delà, tout le monde – même le temps – y gagne.
Le temps est une réalité très relative. En 1993, j’ai effectué une mission au Burundi, dans le cadre de la Filière Café. Mon rôle était d’évaluer une session de formation destinée à des producteurs, des grossistes, des coopératives… La formation devait commencer un lundi matin, à 9 heures. J’avais rendez-vous avec Athanase, le responsable, à 8 heures. Constat glacial : rien n’était prêt, à part le formateur international bien entendu. Quand je dis « rien », c’est « rien » ! Pas de salle réservée, pas de matériel de formation, pas d’intendance (collations, repas…) et… pas même de participants ! Athanase, très serein : « Pas de panique, ça va aller ! ». Pendant quelques heures, je me suis excité, j’ai tourné en rond, je ne pouvais rien faire, j’allais droit à la catastrophe. Puis, à 13 heures, la formation commençait et s’est très bien déroulée. Il y a bien eu quelques participants qui sont arrivés un peu plus tard, d’autres qui se sont absentés une ou deux heures pendant la semaine. Mais globalement, je devais me rendre à l’évidence : tout s’était bien passé, avec efficacité.
Finalement, j’avais été la seule victime ! Si j’avais attendu calmement, avec confiance en Athanase, je me serais fait moins de bile pour rien. J’aurais vraiment dû prendre mon bien en patience.