tam adhiṣṭhātṛbhāvena svabhāvam avalokayan |
smayamāna ivāste yas tasyeyaṃ kusṛtiḥ kutaḥ ||
ekacintāprasaktasya yataḥ syād aparodayaḥ |
unmeṣaḥ sa tu vijñeyaḥ svayaṃ tam upalakṣayet ||
didṛkṣayeva sarvārthān yadā vyāpyāvatiṣṭhate |
tadā kiṃ bahunoktena svayam eva avabhotsyate ||
"Regardant sa véritable nature
comme ce qui gouverne (tous les phénomènes qui adviennent),
demeurant comme émerveillé
- pour lui, d'où s'écoulerait ce mauvais samsara ?"
"Pour qui est plongé dans une pensée,
ce dont surgit une nouvelle pensée,
cela doit être discerné comme l'éveil.
Qu'on le reconnaisse par soi-même."
"Quand il infuse tous les objets
par le désir de percevoir,
alors, à quoi bon beaucoup de mots ?
C'est directement qu'on en fait l'expérience."
Spanda-kârikâ
"Ce dont surgit une nouvelle (apara- litt. "une autre") pensée" : là d'où commence n'importe quel mouvement. Une pensée (cintâ) est un mouvement (vritti). Tous les mouvements particuliers ont leur source dans le mouvement universel qu'est la vibration consciente (spanda). Au premier instant de n'importe quel désir, de n'importe quel mouvement, le sujet et l'objet sont indifférenciés. Ils le sont toujours, bien sûr. Mais dans ce "premier instant", cette unité n'est pas voilée par la manifestation de l'objet différencié. Ce premier instant de tout mouvement est l'instant de l'éveil, c'est-à-dire l'instant où la conscience entre en expansion avant de se contracter aux dimensions de l'objet qu'elle manifeste et avec lequel elle s'identifie plus ou moins. Ce premier instant est l'instant où je peux ressentir que tout est en moi, concrètement, directement. D'où une expérience d'émerveillement et de joie.