Manifester, c'est protester, dénoncer, revendiquer et tenter de renverser le rapport de forces. Chaque manifestant-e a sa part de rêve. Sous l'ère de la technocratie macronienne et de ses faces grises, il n'est plus toléré de s'opposer dans l'espace public et de rêver ensemble.
Samedi dernier, acte 55 et anniversaire des gilets jaunes, a été marqué par une gestion calamiteuse du maintien de l'ordre.
Une gestion que l'on pourrait qualifier naïvement d'amateuriste. En effet, la manifestation avait été déclarée auprès des autorités. Elle avait même été autorisée. Puis, à peine avait-elle débuté que le préfet de police de Paris est revenu sur sa décision : ordre et contre ordre...
Bref, le "bordel" fut ! Totalement voulu, souhaité, désiré, provoqué et même organisé par les autorités. En l'espèce, les forces de l'ordre (FDO) laissèrent les gens se rassembler, puis les empêchèrent de sortir. Toutes les sorties de la place d'Italie était fermées. On appelle ça une nasse.
Saupoudrez le tout de quelques black-bloks, dont certains seraient de la Bac (cf. la vidéo), selon certains témoins, de tirs de lacrymogènes (dont la composition est inconnue des citoyens[1]) et le pouvoir macronien a obtenu ce qu'il recherchait : la violence.
Il y a donc eu volonté du pouvoir macronien que la manifestation dégénère pour fabriquer des images spectaculaires, matière première des chaînes dites d'information, devant lesquelles des éditocrates, mâles ou femelles blanches de plus de 50 ans, spécialistes en tout et surtout en rien, grassement rémunérés, interviennent pour dénoncer les violences des... manifestants ! Et, ce faisant, pour fabriquer du consentement pour l'ordre macronien.
Le régime macronien n'assure plus aux habitant-e-s de ce pays l'exercice du droit constitutionnel de manifester et d'exprimer leurs légitimes revendications. Au contraire, il tente de mettre une chape de plomb pour dérouler sa politique d'injustices sociales et de vente à la découpe du pays. On a même, pour la seconde fois, vu les FDO agresser délibérément un député de l'opposition (lien ici).
Si le citoyen a des idées politiques qui le place dans tel ou tel camp politique, le fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions politiques doit faire abstraction de ses idées politiques et de son appartenance politique, œuvrant de manière neutre et objective pour servir l'intérêt général et l'ensemble de la communauté. Un tel aveu de la part ce haut fonctionnaire est stupéfiant de vérité : c'est la guerre des classes.
Par ailleurs, le lendemain de l'acte 55, quelques énergumènes de l'extrême droite ont manifesté. Là, le cortège n'a pas été nassé, bloqué, et fait l'objet de tirs de LBD et de lacrymogènes... Bref, la différence de traitement entre les deux manifestations est patente. Difficile de ne pas y voir la complaisance du régime macronien pour l'extrême droite quand, quelques jours auparavant, le gouvernement de M. Philippe a purement et simplement fait entrer dans la loi une vieille revendication de l'extrême droite : la suppression de l'AME. Désormais, les personnes malades qui n'auront pas la chance d'avoir les bons papiers devront attendre 3 mois pour se faire soigner ! Plus qu'il n'en faut pour permettre à un virus de faire des dégâts au sein de la population...
Attiser la haine, désigner des bouc-émissaires, dénoncer le soi-disant tourisme médical et social des immigrés sont autant d'éléments qui permettent au régime macronien de faire diversion pour poursuivre sa politique antisociale.
Ainsi, l'extrême centre est prêt à toutes les compromissions avec la droite la plus raciste pour faire passer ses réformes qui détruisent les fondements sociaux instaurés à la Libération.
Avec Macron, la théorie selon laquelle l'extrême droite a toujours été la complice de l'oligarchie et le dernier recours du capitalisme se vérifie. Les plus lucides de celles et ceux qui croyaient que Macron et son « et de gauche et de droite » feraient barrage à l'extrême droite prennent conscience qu'il n'est en fait qu'un pont...
D'où l'importance des mobilisations pour éviter ce scénario écrit d'avance.
Note
[1] qu'est-ce qui justifie le secret de la composition des lacrymogènes ? Un scientifique indépendant tente de la savoir et c'est pour cette raison qu'il a quelques ennuis avec les autorités (ici son entretien dans lemediatv)... Ce secret est révélateur de la conception de la démocratie et de la citoyenneté du régime macronien.