Parmi les réformes mises en place en France ces dernières années, beaucoup se sont inspirées de ce qui se passait en Suisse. Voici un petit tout d’horizon de ces différentes réformes d’origine suisse qui ont été appliquées avec plus moins de réussite en France.
La simplification de la feuille de salaire
En 2014 j’écrivais un post intitulé « Comparaison entre une feuille de salaire suisse et française« . Ce post, qui a été mentionné dans de très nombreux articles et repris par certains journalistes marquait la différence entre les feuilles de salaire françaises (33 postes de charges différents), donc très fournies, et les feuilles de salaire suisses (13 postes de charge, en cherchant bien). En effet, il n’y a rien de plus simple qu’une feuille de salaire en Suisse, et surtout tout le monde (ou presque) peut la comprendre.
Ce qui n’était pas le cas avec la feuille de salaire française. Le 1er janvier 2018, le gouvernement a décidé d’imposer le bulletin salaire simplifié. Dans cette nouvelle feuille de salaire, les postes de charge ont été agrégés, ce qui rend effectivement sa lecture plus simple, mais cela n’a pas rendu sa compréhension plus simple, bien au contraire.
Parmi les choses incroyables que cette feuille de salaire simplifiée permet, et que peu de salariés en France savent, c’est qu’ils financent chaque mois les organisations syndicales françaises (voir ici la rubrique « Autres contributions dues par l’employeur« )…
L’impôt à la source
Puisque nous sommes dans les questions d’argent, restons-y. Depuis le 1er janvier 2019, l’impôt à la source est une réalité pour tous les résidents français ayant des revenus en France. Ce mécanisme existait en Suisse depuis si longtemps que je n’arrive même pas à retrouver quand. Mais avec une nuance : il n’est appliqué qu’aux étrangers, et dans certains cas seulement.
En effet, l’impôt à la source en Suisse, c’est un mécanisme qui permet au service cantonal des impôts de récupérer chaque mois un montant d’impôt directement sur le salaire de l’employé. Cette somme d’argent est prélevée par l’employeur, et reversée à l’office cantonal des impôts. Un mécanisme très similaire à celui qu’on observe en France.
On peut estimer que cette réforme française est, pour la plupart, plutôt une bonne chose et permet une meilleure gestion de ses revenus.
La réforme du droit du travail
La France essaye tant bien que mal de réformer son droit du travail, de le rendre plus actuel, plus adapté à son époque. Difficile, avec les syndicats français, qui bougent pour que rien ne bouge, de faire progresser le sujet. Il y a eu heureusement des avancées, notamment avec le barème Macron qui permet de plafonner les indemnités au titre des licenciements abusifs. Au maximum, un salarié français touchera 20 mois d’indemnités, selon le barème officiel. On est encore loin de la Suisse, où, en général, un salarié dans la même situation touchera au maximum 6 mois de salaire pour ses indemnités de départ.
Le droit du travail suisse est en effet définitivement plus souple, plus équilibré, moins protecteur du salarié.
L’apprentissage
Le système suisse de l’apprentissage est un modèle envié dans le monde entier, et permet notamment de réduire le chômage des jeunes de manière significative. François Garçon, universitaire franco-suisse et auteur de plusieurs ouvrages, dont « Apprentissage, l’autre miracle suisse » n’a de cesse de le répéter depuis des années. Auditionné par le Sénat, par les politiques, il suit le sujet depuis des années et son constat est sans appel : la France a beau constater que cela fonctionne à l’étranger, il ne se passe rien de positif sur le sujet de l’apprentissage dans l’Hexagone. L’apprentissage reste, dans l’esprit collectif, une voix de garage pour étudiants en échec scolaire.
D’ailleurs, en 2017, Antoine Frérot, PDG de Vélio et « fervent » défenseur de l’apprentissage, avait, sur France Inter, simplement déclaré « que ses enfants étaient bien trop brillants pour suivre la filière de ,l’apprentissage« , après une question anodine de la journaliste Léa Salamé.
Le dossier est visiblement en cours de préparation en France, et la grande « bascule » est prévu début 2020. Je ne suis pas sûr que la grande bascule des mentalités se fasse en même temps…
La réforme des retraites
En Suisse, les règles de calcul et d’application de la retraite sont les mêmes pour tout le monde, que vous soyez salarié du public, ou du privé. Certes, il existe des différences significatives avec les Caisses de pension, qui peuvent être plus ou moins intéressantes selon les sociétés, mais au moins, le mode de calcul est identique.
La France, empêtrée dans plus de 40 régimes différents, principalement pour les fonctionnaires et salariés des sociétés privées comme la SNCF, a beaucoup de mal à unifier tout le système, frustrant d’un côté des salariés du public gavés aux avantages depuis plusieurs années, et frustrant de l’autre les salariés du privé qui n’acceptent plus les avantages dont bénéficient les salariés du secteur public.
En conclusion
Le côté positif, c’est que la France essaye de réformer, sur la base de bonnes idées qui ont fonctionné à l’étranger. Alors certes, toutes ces « idées » ne sont pas toutes spécifiquement suisses, mais elles ont fait leur preuve de l’autre côté de la frontière française et dans d’autres pays.
D’ailleurs, j’en ai sûrement oublié quelques-unes, alors je vous invite à compléter mon développement !
crédit photo : Sarah Bakhshi – Unsplash