Si la notoriété des escrimeurs et escrimeuses en France est clairement à construire, il faut appuyer sur le fait que nous possédons de sacrés champions ! En effet, il est peut-être délicat de mettre un visage sur le nom de " Charlotte Lembach " et pourtant, on parle d'une escrimeuse et plus particulièrement d'une sabreuse au palmarès impressionnant. En individuelle, la native de Strasbourg a notamment deux médailles européennes (argent en 2015 et bronze en 2016) ainsi que 4 médailles mondiales par équipes dont un titre en 2018. Aujourd'hui, il est temps d'en savoir plus sur cette athlète accomplie qui fait la pluie et surtout le beau temps du sabre français depuis 10 ans. Découvrez Charlotte Lembach, une fan de sa région, de la culture US et surtout une escrimeuse hors-pair !
Charlotte, peux-tu nous parler de ta rencontre avec l'escrime ?C'était vraiment un pur hasard, ce n'est pas du tout à la télévision ou autre. En fait, j'accompagnais ma mère et mon grand frère à un stage omnisports et vu que je n'avais pas l'âge, je ne pouvais rien faire et donc j'ai pleuré. A noter donc que j'avais déjà un fort caractère (rires). Du coup, le directeur du stage m'a accepté et à la fin de celui-ci, il y avait de l'escrime et j'ai battu tous les garçons. Etant donné que le directeur du stage était également maître d'armes, il est allé voir ma mère pour lui dire que j'avais peut-être un potentiel et qu'il aimerait bien m'entraîner. Tout de suite, j'ai adoré ce sport et son esprit combatif.
Pourquoi avoir choisi le sabre vu que l'on commence souvent l'escrime par le fleuret ?Alors j'ai commencé par le fleuret car le sabre féminin n'existait pas à mon époque. Cela a fini par apparaître, j'ai essayé pendant 1 an et cette arme me convenait totalement. C'était plus explosif, plus dynamique et donc j'ai arrêté le fleuret qui nécessitait trop de précision pour moi. J'étais bien meilleure avec la lame et du coup j'enchaîne avec un premier titre de champion de France. Le choix de changer d'arme a été immédiatement payant car cela correspondait beaucoup plus à ma personnalité. Et honnêtement si j'avais persévéré en fleuret, cela n'aurait pas été brillant car encore aujourd'hui lorsque l'on change d'arme pour le fun, je ne suis pas bien douée. Il faut mettre en place une tactique, être plus réactive, et il faut surtout plus de patience...ce qui n'est pas mon fort !
Que représentait pour toi le sport plus jeune ? Et l'école ?C'était un défouloir déjà car j'avais un tempérament assez impulsif et il fallait que je me dépense. La première chose que j'ai appris grâce au sport, ce sont les valeurs du respect : son adversaire, les horaires,...Ces règles m'ont permis d'avoir un cadre de vie ! Le sport m'a permis de m'adapter à toutes les circonstances, de me fixer des objectifs, de planifier un emploi du temps. Ainsi, le sport m'aide aujourd'hui encore à me projeter sur mon avenir, d'avoir des objectifs clairs sur 3-4 ans,...
Concernant l'école, c'était beaucoup d'organisation, de gestion et surtout de travail à la dernière minute (rires). J'avais besoin de cette adrénaline pour m'épanouir et c'était de l'efficacité pure. J'adorais ce côté prise de risque et la pression qui allait avec !
Quel genre d'élève étais-tu ?Très à cheval sur les règles (rires) ! Pas question d'arriver en retard par exemple. En plus, j'ai des parents qui travaillent dans l'éducation nationale donc j'avais déjà une éducation très forte sur cela. Je rendais toujours mes devoirs à temps, je ne dormais pas en cours, j'étais très à l'écoute de mes camarades que ce soit pour les devoirs ou même pour me raconter leur vie. Pour moi à l'école, je ne devais pas me disperser à droite ou à gauche et il fallait être sérieuse et concentrée. J'étais une bonne élève mais il fallait que je bosse, je n'avais pas un talent inné pour les études.
A quel moment as-tu pu imaginer que tu ferais carrière dans l'escrime ?On est un sport amateur donc c'est vrai qu'il est difficile de se projeter dans une optique de métier même si à l'heure actuelle, j'ai la chance de vivre de ça. Le déclic s'est fait lorsque j'ai commencé à gagner des titres de championne de France, à faire des sélections en équipe de France jeune et que j'ai intégré le groupe France. C'est vers 17-18 ans que je me suis dit que c'était le bon moment pour se mettre à rêver et d'un jour participer aux Jeux Olympiques.
L'arrivée à l'INSEP, cela s'est passée comment ?A l'époque, l'escrime féminine n'était pas basée à l'INSEP, il n'y avait que les équipes masculines. On était du côté de Châtenay-Malabry. J'étais au lycée à Strasbourg et on m'a mis un ultimatum qui était que si je ne rentrais pas maintenant dans le groupe France, je n'y rentrerais jamais. Du coup, ma mère a fait toutes les démarches pour que j'y aille mais de mon côté, j'avais envie de terminer mon bac. Je n'ai pas eu le choix et j'y suis allée à contre-coeur. En plus quand je suis arrivée, l'ambiance, notamment entre les plus jeunes et les grandes, était délétère. Par exemple à l'entraînement, les titulaires en équipe de France tiraient qu'entre-elles et on n'avait pas voix au chapitre. Donc forcément, j'ai loupé mon bac cette année-là car je n'allais plus en cours et j'ai tout simplement fait une petite dépression. Je partais de chez moi, j'arrivais en banlieue parisienne, avec des gens que je ne connaissais pas et cette année d'intégration fut très très dure. Les années suivantes, ça allait mieux mais je me suis fait promettre de ne jamais faire subir ce que j'avais subis aux nouvelles entrantes à l'INSEP. Mes petites nouvelles, je les accueille à bras ouverts et je fais en sorte que leur intégration se passe bien.
Clairement, cette année fut super dure mais cela m'a permis d'apprendre plein de choses et notamment le fait de se battre et de ne jamais abandonner. Car j'ai voulu abandonner mais mes parents m'ont forcé à rester.
L'escrime est un sport très tactique et mental, quel est le style Lembach ?Je suis une personne très puissante et très explosive et pas du tout patiente. Quand il y a un problème, j'aime bien que la solution soit vite trouvée et forcément cela pêche quand je n'arrive pas, ni mon coach, à la trouver. C'est à ce moment là que je dois canaliser cette explosivité et envie. Grâce à mon préparateur mental, je cherche les outils pour me reconcentrer sur moi-même et faire de la visualisation mentale notamment. L'escrime est un jeu tactique et il faut réussir à piéger l'autre lorsque toi tu es face à un obstacle.