Les photographies sombres et magnifiques de Michael Lundgren ouvrent au spectateur une fenêtre sur un monde mystique où le temps lui-même semble s’effondrer. Préoccupé par le manque de lien entre l’homme et la nature, le photographe américain a entamé sa série Geomancy (publiée aujourd’hui par les éditions Stanley / Barker) en 2016, avec l’aide d’une bourse Guggenheim. Terme métaphysique, la géomancie fait référence à la relation entre la matière et le monde spirituel à travers un lien de divination et d’interprétation. La capacité de la photographie à ressembler et à transformer le monde naturel se révèle être une interrogation centrale dans cette œuvre. Alors que la photographie de paysage a longtemps été consacrée à de vastes panoramas et au grandiose, Lundgren se concentre sur l’invisible et l’inexplicable – des objets et des espaces qui semblent hors du champ du temps mais qui font référence à l’histoire d’un paysage occupé. Ses clichés saisissants lui demandent souvent d’escalader des montagnes, d’explorer des grottes d’une noirceur extrême ou de s’aventurer dans le désert à la recherche de paysages autrefois occupés par des êtres humains: villes en ruines, anciens cimetières ou artefacts d’un voyageur dans le désert, le tout brouillant souvent les frontières entre ce qui est naturel et ce qui est fait par l’homme. Le processus artistique complexe du photographe utilise la manipulation dans l’appareil photo, la chambre noire et l’ordinateur. Les images qui en résultent soulignent la résonance sculpturale et symbolique de ces objets trouvés à travers la nature bidimensionnelle de la photographie. Elles sont conflictuelles dans leur étrange beauté, créant un contrepoint intellectuel à notre idée de la nature en tant que bienfaiteur de l’humanité ou Eden – rappelant que la nature peut se passer de nous, mais que nous ne pouvons pas nous passer d’elle. Lundgren explique: “Le paysage a toujours été pour moi une invitation au mystique, pour ce qui échappe à notre compréhension rationnelle du monde. J’ai essayé de faire des photographies qui servent de parallèle pour cette entrée. Cela invite le spectateur à contempler un monde qu’il ne comprend pas et, ce faisant, à arrêter sa propre vision du monde.” Le livre de 80 pages, au design particulièrement original et soigné (signé The Entente), est maintenant disponible sur la boutique en ligne des éditions Stanley / Barker.