Rencontre

Publié le 17 juillet 2008 par Dunia

Dans ma bulle

Hier soir, en promenant ma chienne, j’ai rencontré Madeleine qui promenait la sienne, une petite corniaude  ramassée dans une poubelle il y a un mois. Je n’avais envie de voir personne, pas même une amie, mais à sa demande,  assises sur des marches d’escaliers, nous avons discuté un quart d’heure. Ou plutôt elle a parlé, et de temps à autre je disais “oui”, “non”, “j’y crois pas”, “n’importe quoi”, “pfffffffff”, “ah bon”. Un couple avec un caniche, et plus tard un homme seul, se sont arrêtés pour disserter sur les chiens et le temps. Elle seule a répondu. En la quittant je me suis sentie extrêmement fatiguée et déprimée. Ces brefs échanges m’avaient vidés. En remémorant ma semaine, je me suis aperçue qu’à part un téléphone avec ma mère -elle va très bien, si, si, bien sûr elle baigne dans le bonheur-, un autre avec mon père qui m’a d’ailleurs dit “Tu dormais? Je te réveille?” assez contrariant car je me lève tôt et m’agite durant toute la journée, or comme j’écrivais, l’éjection brutale hors de ma bulle ne m’avait pas permis de me recentrer avant de répondre, ce qui me donnait un phrasé léthargique, et plusieurs appels avec Angèle qui me connaît bien, et avec qui je m’abstiens d’efforts relationnels inutiles, je n’avais parlé à personne depuis samedi, sans que j’éprouve le moindre manque. Depuis plusieurs jours, je bouge dans mon chez moi, je soigne mon  jardin, j’écris pour un nouveau récit, je m’occupe de ma ménagerie. Ça occupe amplement mes journées, au bout desquelles j’arrive sans jamais avoir pu faire tout ce que je prévoyais. De plus, lorsque j’écris  pour un roman en cours, je rentre dans ma coquille afin de ne pas disperser mes idées, de rester dans l’ambiance de mon projet. Les personnages que je crée -ou recrée s’ils sont issus d’une réalité- me tiennent compagnie. Deviennent mes amis. Parfois de haïssables amis, mais des amis tout de même. Je n’ai plus besoin de personne. Où si peu. En ce moment pourtant, afin de pouvoir recevoir, je tente de composer autour de moi une ambiance agréable. Je n’ai pas réellement envie de relations humaines, mais il y a des personnes qui m’ont rendu d’innombrables services, que je me dois d’inviter, au moins, pour un repas confortable. De surcroît je sais que, si je m’isole trop, le roman en gestation pourrait m’envoyer en psychiatrie. Contrairement à de précédents écrits issus de mon clavier, si brûlants pour les yeux des lecteurs que certains ne peuvent les lire jusqu’au bout, celui-ci est formulé d’une prose facile à parcourir. Ennuyeuse où de  mauvaise qualité peut-être, ça je l’ignore encore, cependant d’une lecture aisée. Je ne crois pas que quiconque s’apercevra que je mets ma vie, mon équilibre, ma santé mentale en jeu. Pourtant…

Merde! Ce serait si doux -dans un premier temps- de m’enfermer avec mes personnages. De ne plus voir personne. De me laisser glisser dans la démence.

Quand je n’écris pas, je deviens folle. Quand j’écris, je joue avec la folie. Drôle de destin.

Aujourd’hui, je dois téléphoner à Karl et Begonia pour les inviter dîner. Préparer à manger pour les autres, j’aime. Mon côté mère nourricière frustrée. Ce soir Alexandra et Angèle viennent souper. Je me réjouis de les recevoir. Ou peut-être seulement de les alimenter. Enfin… au moins je me réjouis de quelque chose qui a un rapport avec autrui.

Le soleil semble ne pas s’être levé. En gouttes rageuses, un fleuve tombe d’un ciel gris. Un temps à m’enfermer dans ma bulle.  Je ne le ferais pas. Angèle et Alexandra arrivent à quatre heures.