Lectrices historiennes, lecteurs géographes, je vous ai déjà parlé de la Louisiane et de la plantation Whitney, -premier musée de l'esclavage aux Etats-Unis d'Amérique.
Pour comprendre les racines de ce système économique et politique, il faut en venir à la canne à sucre. Christophe Colomb l'a amené des Canaries en Amérique. Ensuite, des esclaves ont été déportés d'Afrique par millions pour la cultiver. Ils n'étaient pas les seuls. J'ai connu une Ecossaise dont les ancêtres avaient été esclaves dans les plantations en Jamaïque. Elle haïssait tellement les Anglais qu'elle avait épousé un Italien et était devenue Française. " C'est à ce prix que vous mangez du sucre en Europe " dit l'esclave noir enchaîné, torturé, amputé à Candide dans l'oeuvre de Voltaire, lui même actionnaire de compagnies sucrières.
En Louisiane, le système des plantations était particulièrement juteux. C'est l'histoire que raconte le New York Times Magazine dans un article partiellement traduit en français par Courrier International. L'auteur, le professeur de Harvard, Khalil Gibran Muhammad (Histoire africaine-américaine) nous explique les origines esclavagistes et coloniales du sucre qui sature le régime alimentaire des Américains et comment ce système perdure dans le " bon Vieux Sud " concentré dans les mains des descendants des anciens propriétaires d'esclaves et gorgé de subventions publiques. Toute ressemblance avec des îles des Caraïbes serait évidemment fortuite.
Aux USA, vous pouvez même acheter du sucre produit au Louisiana State Penitentiary situé dans un lieu nommé Angola car la prison, surnommée " The Farm ", se trouve sur une ancienne plantation dont les esclaves venaient majoritairement d'Angola en Afrique australe, ancienne colonie portugaise. Cela se visite. Il existe un musée dans la prison dont vous ne sortez pas vivant, le genre de lieu où vous ne voulez pas être comme le chante Champion Jack Dupree (1910-1992), natif de La Nouvelle Orléans, Louisiane, dans " Angola Blues ". Cf vidéo ci-dessous.
Par ailleurs, quand un Texan, Sam Lightnin Hopkins (1912-1982), voulait être sûr que sa chérie n'aille pas voir un autre homme, il allait en Louisiane se chercher un fétiche, une " Mojo hand ". Cf extrait audio au dessus de l'article.