Cela fait quelques années que j’ai abandonné l’idée décrire un article pour l’anniversaire du blog. C’est un peu comme pour le couple. On fête les 5 premières années et on arrête. On fête les dizaines éventuellement. Attention, je ne dis pas là que l’habitude est venue s’installer dans mes chroniques. Jamais. J’écris parce que j’ai encore quelque chose à dire. Lorsque le théâtre aura cessé de me faire vibrer, alors je cesserai cet exercice que je sais vain.
Il s’est passé beaucoup de choses en 9 ans. Le blog m’a fait connaître de grandes joies comme de grandes peines. Il m’a permis de rencontrer des gens qui, j’espère, continueront de faire partie de mon chemin un petit bout de temps. Il m’a nourrie sur bien des plans. Je ne dénigrerai jamais ce qu’il m’a apporté même si cela fut parfois délicat à supporter. Il m’a faite grandir, indéniablement. Il m’a donné confiance en moi, ce qui n’était pas gagné malgré les apparences. Aujourd’hui je sais que je peux donner un avis sur une pièce de théâtre sans en avoir honte. C’est une petite victoire de moi sur moi. Je prends. Je connais un peu la réputation que je peux avoir parmi les blogueurs. Je suis la cruelle. Je ne renie pas ce titre. Je l’ai moi-même nourri parfois. J’aime la franchise qui l’accompagne. J’espère ne jamais perdre cela.
Mais il me coûte aussi. Derrière cette caractérisation se trouvent les blessures qui l’accompagnent. Je ne pense pas me donner plus d’importance que je n’en ai en reconnaissant que j’ai pu blesser parfois. Comédiens, metteurs en scène, auteurs, créateurs, je vous fais ici mon mea culpa. A ceux qui me connaissent, vous savez que mon intention n’a jamais été de blesser mais de partager la passion qui m’anime. A ceux qui ne me connaissent pas, sachez que j’ai un profond respect pour votre métier et que, pour parodier Ratatouille, « dans le grand ordre des choses, le spectacle le plus médiocre aura toujours plus de valeur que la critique qui le caractérise comme tel. »
Je me suis souvent demandée si je devais continuer à écrire, ou n’écrire que sur ce que j’aimais. Mais cela ne serait plus en accord avec le but que je m’étais fixée à l’ouverture de ce site. Je voulais écrire pour les spectateurs. Je ne travaille pas avec les attachés de presse, j’ai la chance que certains comprennent mon point de vue et continuent de me solliciter. Je voulais être ce papier où l’on était sûr de trouver un avis franc – pas universel, simplement franc. Un avis biaisé ni par le politique, ni par les amitiés. Je ne m’attendais d’ailleurs pas à me faire des amis. J’ai eu la chance de nouer de beaux liens sur le chemin mais la double casquette n’est pas toujours facile à gérer. A toi que j’ai blessé malgré moi, sache que pas un jour ne passe sans que je regrette ce départ impromptu.
La franchise, j’ai essayé de la manier avec bienveillance. J’ai essayé de dire « je », et non « c’est ». J’ai essayé d’argumenter toujours, dans le positif comme dans le négatif. J’ai essayé chaque fois de mettre en perspective le travail fourni sur le plateau et l’effort demandé au spectateur, pour parodier Pierre Notte, cette fois-ci. J’ai essayé de ne pas me laisser influencer par les critiques d’un spectacle que j’allais voir. J’ai essayé de garder l’enthousiasme des premières fois au théâtre, les yeux qui brillent, l’eau à la bouche. J’ai essayé de ne pas devenir une caricature de moi-même. J’ai essayé de toujours me laisser surprendre. J’ai essayé de mettre de l’objectivité dans ma subjectivité. Et je vais essayer encore.
Essayer. Rater. Essayer encore. Rater encore. Rater mieux.