Sur la pochette, il a l'air fatigué. Dans ses dernières déclarations, il semble complètement dépassé, oubliant en partie, ce pourquoi son public le suit depuis des années. Lui, qui refusait de manger à n'importe quelle soupe populaire et rêvait de plus belles choses. "Foule sentimentale", voilà la chanson qui, croyait-on, allait le suivre jusqu'au bout, parce qu'elle résumait le personnage : cette mélodie immédiate, ce texte sensible, simple et direct. Cette chanson populaire dans le sens le plus noble du terme, paradoxalement anti-société de consommation. On peut reprocher les flots de haine déversés par les réseaux sociaux, mais on ne peut nier qu'en encensant de manière à peine voilée Macron, Souchon renie une grande partie de sa carrière, comme une violente traîtrise faite à ses fans les plus ardents. Le comble, c'est que le chanteur ne semble même pas s'en rendre compte. Tristesse de la vieillesse ou jeu d'acteur enfin percé à jour après plus de 40 ans de carrière ? En faisant fi de cet épisode déplorable, qu'en est-il de la musique et de ce nouveau disque, "âmes fifties", comme un aveu de désuétude avancée ? Et bien, sans surprise - mais en attendait-on vraiment de sa part ? - mais plutôt bon. Si le fond émeut moins, la musique fonctionne encore très bien, plus pop que jamais. Le chanteur n'avait donc nullement besoin de faire parler de lui pour autre chose que ce qu'il sait faire de mieux : écrire des chansons. Même si cela paraît difficile, on va essayer de ne retenir que ça et se dire qu'il reste encore à 75 ans, un maître de la chanson française, adulé de beaucoup, Édouard Baer qui l'avait convoqué pour la bande originale de son excellent dernier film, "Ouvert la nuit" - enfin disponible ici en conclusion du disque - ou Vincent Delerm sur son dernier album, "Panorama".