Le fruit du silence d'Arnauld Pontier - Actes Sud, 2008
Au départ, l’histoire peut sembler simple : un ancien déporté, Gert, et son fils, André, séparés par la guerre ; entre eux, un seul homme qui puisse faire le lien, Jurij, opiomane, écrivain, qui a veillé de loin sur l’enfance d’André, lequel a grandi à l’Assistance publique.
Pourtant, hormis un pan de passé, André et Jurij n’ont pas grand-chose en commun quand, en cette année 1967, le premier, devenu jeune homme, retrouve celui qui pourrait faire figure de père et se met à l’écoute de sa désespérance, dont on ne sait exactement (du moins pas encore) ce qui a pu l’engendrer, à l’écoute de ses tentatives pour échapper à une réalité qui toujours le rattrape, comme le passé dont il ne parle jamais. À cette trame première, vient s’entrelacer une histoire d’amour teintée d’irréalité, quand André croise une jeune femme dans un bar : une figure fascinante, « trop parfaite pour lui », dont il se met à guetter les apparitions sans pouvoir l’approcher, comme « dépouillé » quand il voit d’autres hommes s’intéresser à elle. Toutefois, c’est elle, Flora, qui va permettre à André d’afficher une audace nouvelle, de se découvrir et de mettre des mots sur son identité, car il espère ne pas être seulement un orphelin sans racines, «embourbé dans cette béance de n’être personne et de devoir devenir quelqu’un. »
Le roman débute en 1967 mais c’est quatre années plus tôt, à Venise, que l’on fait la…