Point d’orgue de notre week-end bourguignon, le dîner de gala du samedi soir, au restaurant gastronomique de l’Hostellerie de Levernois, avec cette année un événement particulier puisque nous y fêtions notre dixième anniversaire de présence (première visite en juin 2009 à l’occasion d’un « Elégance des Volnay » aujourd’hui disparu). La décision fût vite prise, carte blanche à tous les étages : « Menu surprise » et vins dégustés à l’aveugle, le choix, le conditionnement et la préparation des bouteilles ayant été orchestré de mains de maître par le sommelier Nicolas Geoffroy. Une nouvelle fois, nous soulignerons l’excellence de cette maison, dès l’accueil toujours amical par Madame et Monsieur Bottigliero, et ensuite aussi bien en cuisine où officie avec bonheur depuis 15 ans le chef Philippe Augé qu’en salle où le ballet du service est mené avec précision, style et décontraction par Bernard Bruyer, le véritable maître de cérémonie. Apéritif au salon, ses amuse-bouche (sphère de tomate et foie gras / jambon persillé / Saumon fumé au fromage de chèvre), avec un Chassagne-Montrachet 2016, domaine Fontaine-Gagnard : un nez très floral frais, sur les amandes grillées. En bouche, tension acide dynamique et noble, sur une fine salinité. Une petite pointe d’amertume salivant est décelable, jusque dans la finale. De la mâche, un côté terrien très agréable, sur l’élégance. Finale riche sans lourdeur. Très Bien (+)
Et maintenant, à table.
En guide d’amuse-bouche : bonbon de saumon fumé : Fraîcheur de la mise en bouche, belle association entre le grain du poisson et l’onctuosité du chèvre. Très appétissant Le Foie gras de Canard au Cassis, condiments et pain de campagne grillé : Superbe entrée en matière avec ce contraste entre le gras et l’opulence du foie et la fraîcheur acide / acidulée du cassis et la vivacité des betteraves pickle. Belle promesse d’un moment d’exception ! Les Noix de St Jacques Poêlées, Royale de Corail et Sommités de Chou-Fleur Multicolore, sauce au Beurre d’Algue : Les premières Saint Jacques, quel délice et quelle renouveau dans les saveurs et les textures. Cuisson parfaite, tendresse de la noix et grain faussement tannique du Chou s’associe parfaitement. Synergie presque parfaite. On monte encore dans l’échelle du plaisir Le Homard Bleu, Coussin de Chou Pointu aux Algues et Radis Noir, Pinces en Sabayon, jus de Carcasse coraillé Le Tronçon de Bar aux Cèpes, légumes de saison : Poisson noble, cuisson nacrée comme je l’aime, accompagnements savoureux, jus aromatique légèrement onctueux, juste ce qu’il faut pour ne pas alourdir la chair tendre du Bar. Superbe plat La Pomme de Ris de Veau aux Noisettes, Pommes Bouchons et Girolles « Clou », jus aux écorces de Sapin : Il y a quelques années, j’ai eu une sorte de rejet des ris de veau. Heureusement, depuis 2 ans, mon goût est redevenu « normal ». Et il aurait été fort dommage de se priver de cette nouvelle révélation, une chair onctueuse, un braisé croquant, un accompagnement … qui accompagne parfaitement et une sauce presque tannique. Le summum Les Fromages frais et affinés : Carte blanche à Monsieur Bernard Bruyer pour les fromages, et j’ai été particulièrement gâté (dont un Comté de 2015 d’anthologie). La réputation du restaurant est intacte ! En pré-dessert : sur un registre de fraîcheur, de sorbets et de fruits rouges : N’a pas à rougir de son qualificatif de « pré » dessert. Fraîcheur ultime qui remet en appétit La Fraîcheur d’Agrumes en Croûte d’Amande : Belle conclusion d’un repas toujours sur un registre de fraîcheur et de finesse. Alliance de l’onctuosité des sorbets et du croquant de l’amande. Tout est bien qui finit bien Comme maintenant depuis quelques temps, nous confions notre choix des vins à Nicolas Geoffroy, chef sommelier de l’établissement. Et comme d’habitude, les vins sont servis à l’aveugle complète (et comme d’habitude, je me plante littéralement). Premier vin C’est un blanc possédant un grand nez de chardonnay floral, puis des touches minérales fines et assez évanescentes, qui disparaissent rapidement à l’aération, au profit d’un côté aromatique poudré de belle facture. La trame pourrait paraître chablisienne, mais il y a un supplément plus floral et un déficit des notes de coquilles d’huitres. Bouche basée sur une belle corpulence, avec de magnifiques amers grillés, dégageant une salinité mesurée. L’élevage est à peinte perceptible à ce niveau. L’acidité en bouche est bien présente, ce qui nous aiguille vers un vin plutôt jeune. Du volume, un peu d’opulence sur un registre frais, jusqu’à une finale saline. Je penche sur un Meursault assez tendu, plutôt premier cru. Accord majeur avec les St Jacques puis avec le Bar. Excellent + Verdict : Chassagne-Montrachet, premier cru Les Grandes Ruchottes 2015, domaine Bernard Moreau Bonus 1 C’est un blanc dont le nez évoque une origine méridionale que se situe ‘a priori’ dans le Languedoc, sur des cépages plutôt aimables (Grenache blanc, Bourboulenc, … en tout cas sans la lourdeur du couple Marsanne / Roussanne. Bouche assez charpentée, avec une opulence marquée sur les fleurs capiteuses (type violette). Fraîcheur saline associée à une aromatique puissante, mais peut-être un peu courte sur la finale, particulièrement saline. Je sèche un peu et je reste en Languedoc. Très BienVerdict : Côtes du Rhone 2017, domaine Jamet (cépage Viognier !) Deuxième vin Un premier nez à la fois terrien et très élégant. Des fruits noirs, de la soie et une pointe fumée se dégagent. Bouche sur un registre similaire, aérienne, fraîche car tendue par une acidité de bonne facture, un grain tannique d’une finesse extrême. Je décèle une pointe herbacée noble, typée « rafle mûre », douce. Finale sur des tannins de soie, une pointe glycérinée apportant des sensations d’alcool noble, très salivant. Je pars sur un Chambolle ou un Vosne-Romanée, d’une dizaine d’année environ. Beau concerto de douceur et d’élégance avec la chair du ris de veau et le croustillant de son grillé. Excellent + Verdict : Nuits Saint Georges, premier cru Aux Cras 2010, Bruno Clavelier Troisième vin (avec les fromages) Un joli chardonnay au nez, qui possède un air de famille avec le Chassagne dégusté précédemment. Bouche plutôt énergique, avec une opulence tendue et un côté plus terrien, plus profond mais moins élégant que le Grandes Ruchottes. Supplément de gras sur la finale, avec un bel accord avec l’ensemble du plateau (même si un « jaune » eut été idéal avec le vieux Comté). Sans idée précise, je souligne juste l’air de famille précédent … Très Bien ++
Verdict : Chassagne-Montrachet, premier cru les Chenevottes 2015, domaine Bernard Moreau Bonus 2 Avec le dessert, un dernier vin pour lequel je suis passé un peu à côté (c’est vrai que la vivacité des desserts et leur acidité n’a pas concouru à mettre en valeur le vin). Donc, je suis passé à côté d’un nez sur la pâte de coing au profit de notes plutôt muscatées, sur les agrumes. En bouche, la sucrosité est assez mesurée, presque minérale. Aromatique fruitée, avec une pointe de sucre candy. J’écarte pas mal de régions et je reste sur un Muscat d’Alsace d’un équilibre « demi-sec ». Bien + Verdict : Coteaux du Layon, les Greffiers 2015, château de Passavant (et en plus, on l’avait gouté en juin !) Fin de soirée sous le signe de la discussion et du partage, puisque nous avons visité les caves et les cuisines alors que le service n’était pas encore terminé. Mention spéciale au Chef, Philippe Augé, qui est venu discuter avec nous quelques instants. Outre la qualité et l’excellence de l’assiette, il transpire une sorte de quiétude dans ses propos. Modestie, humilité et professionnalisme ! Accueil, disponibilité, précision, discrétion et décontraction en salle comme en cuisine (et je ne parle pas des fromages …) ; service millimétré pour les vins. Tout est présent pour notre plus grand plaisir. Un immense merci à l’ensemble des équipes pour ce long moment d’exception maintes fois renouvelés. Quel dixième anniversaire de Levernois ! « La gourmandise commence quand on n’a plus faim » (Alphonse Daudet). Bruno