Une sorcière à la Cour de Philippe Madral

Par Artemissia Gold @SongeD1NuitDete

De quoi ça parle ?

" Si les hommes étaient plus aimants, ces prétendues sorcières n'existeraient pas. Ces malheureuses, que leurs époux battent, parfois jusqu'à la mort, n'est-il pas juste qu'elles cherchent à s'en défendre ? C'est la condition dans laquelle notre société tient les femmes qui provoque de telles aberrations criminelles. "

1678. Tandis que Louis XIV mène grand train à Saint-Germain et Versailles, Paris est frappé par les meurtres les plus abominables et la rumeur enfle : des empoisonneuses œuvrant pour le diable auraient infesté la ville.
Lorsque le scandale gagne la cour, le roi ordonne à La Reynie, lieutenant général de police, de démanteler les officines et de punir les sorcières. À mesure qu'il enquête, ce dernier comprend que le roi est victime d'un complot. Mais surtout, il découvre que derrière ces actes diaboliques se cache une plus grande violence encore, subie par les femmes. Maintenues toute leur vie sous l'autorité d'un père, d'un frère ou d'un mari, ont-elles d'autre choix que le crime pour conquérir leur liberté ?

Dans cette enquête sulfureuse, Philippe Madral nous plonge au cœur d'une société en pleine mutation et revisite sous un jour complètement nouveau la célèbre affaire des Poisons, avec un souffle romanesque exceptionnel.

Une sorcière à la Cour retrace dans 400 pages, 30 ans de vie et d'intrigue à la Cour du Roi Soleil. Philippe Madral crée une histoire dans l'histoire et se base sur des faits réels pour développer les Mémoires d'un homme qui fut connu dans le monde pour sa droiture et son sens du devoir, Nicolas de La Reynie.

L'intrigue nous plonge dans une Cour tourmentée et débute sur l'exécution de la tristement célèbre Marie-Madeleine Dreux d'Aubray dite la Marquise de Brinvilliers, une femme condamnée pour crime de fratricide par empoisonnement. Une affaire qui va débouler sur une succession de scandales et révéler une ville lumière bien différente de celle qui transparaît hors de France. Et si Philippe Madral retrace avec précision l'affaire des poissons, des secrets de Polichinelle, en passant par les complots contre le roi et les intrigues de la Cour, il nous raconte avant tout la vie de La Reynie. Sa vie de famille, ses amours, les frasques de son passé, ses doutes, ses incertitudes et surtout son enquête pour débusquer ses prétendues sorcières, faiseuses de miracles, empoisonneuses, magiciens, avorteuses ou encore faiseurs de messes noires et diseuses de bonnes aventures, qui affluent dans le Tout-Paris, un réseau que le Roi veut voir radier une bonne fois pour toutes.

La plume de Philippe Madral est fluide, aérienne et agréable à lire. J'ai senti un réel travail de documentation de la part de l'auteur et quand on sait qu'il lui a fallu trois ans pour réaliser une telle œuvre, je peux dire que la fin justifie les moyens. J'ai adoré découvrir des facettes de la personnalité et de la vie privée de Nicolas de La Reynie qui m'était jusqu'à alors inconnu. L'auteur nous immisce dans sa tête, en s'appropriant ses mots et ses actes pour nous retracer le plus logiquement possible ce que fut la vie de cet homme dont l'intégrité et le respect de la justice avaient si souvent intimidé le Roi Louis XIV. L'auteur décortique pièce par pièce l'une des affaires les plus controversées et retentissantes de l'histoire, car sans ses fameuses " Mémoires de La Reynie " dont il se sert pour son ouvrage, aurions-nous su un jour que la Marquise de Montespan avait eu recours à des faux prêtres ou philtres d'amour en tous genres pour garder les faveurs du Roi ? Rien n'est moins sûr.

En somme, " une sorcière à la Cour " est un roman historique passionnant bourré d'actions, de rebondissements, de retournement de situation, mais aussi de tendresse et d'amour, même si ces deux genres sont relégués au second plan. La note de Philippe Madral à la fin de son roman, conclut plus de trente ans d'histoire et si j'en garde une phrase en mémoire, c'est bien celle-ci : " Mais ce dont Louis XIV se doutait encore moins est que celui qu'il croyait son plus fidèle serviteur lui jouerait avant de mourir le mauvais tour d'écrire ses Mémoires en se servant d'elles ".

Un roman historique qu'il faut lire !

On aime : La plume de l'auteur, la couverture assez révélatrice, l'intrigue autour de l'affaire des poisons et de la vie de Nicolas de La Reynie, le contexte historique, le travail de documentations.