Paratonnerres célestes,
qui résistez aux plus violents des orages,
tels des crêtes muettes,
tels des cimes agrestes,
des éternités vous êtes le barrage !
Une Espérance magique le jour nous prédit
au cours duquel, sur le rocher d’harmonie
périra la sirène aux perfides atours.
Espérez donc, espérons donc toujours !
Espérez donc toujours.
L’élément bestial se divertit
dans la haine de la poésie
et les races s’offensent tour à tour.
L’insurrection d’en bas
s’étend aux Excellents.
Le cannibale convoite sa proie,
le rouge aux gencives et l’écume aux dents.
Donjons, mettez un sourire au pavillon.
Opposez aux craintes et aux manifestations malignes
d’une brise la superbe inspiration,
brise d’une tranquillité céleste et marine…
*
¡Torres de Dios! ¡Poetas!
¡Pararrayos celestes
que resistís las duras tempestades,
como crestas escuetas,
como picos agrestes,
rompeolas de las eternidades!
La mágica esperanza anuncia un día
en que sobre la roca de armonía
expirará la pérfida sirena.
¡Esperad, esperemos todavía!
Esperad todavía.
El bestial elemento se solaza
en el odio a la sacra poesía
y se arroja baldón de raza a raza.
La insurrección de abajo
tiende a los Excelentes.
El caníbal codicia su tasajo
con roja encía y afilados dientes.
Torres, poned al pabellón sonrisa.
Poned, ante ese mal y ese recelo,
una soberbia insinuación de brisa
y una tranquilidad de mar y cielo…
***
Rubén Darío (1867-1916) – Cantos de vida y esperanza (1905) – Chants de vie et d’espérance (Sillage, 2012) – Traduit de l’espagnol (Nicaragua) par Lionel Igersheim.
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