Magazine Culture
J’ai lu il y a quelques temps des nouvelles de Juan Rulfo. Je poursuis ma découverte avec ce roman, que j’ai beaucoup plus apprécié que mes premières lectures. J’ai eu l’impression de ne pas toujours en saisir toutes les subtilités (c’était en VO) mais j’ai été bluffée par l’ambiance et le brouillage des pistes. Juan, notre narrateur part à la recherche de son père, Pedro Paramo, pour réclamer son bien. Il se rend à Comala après la mort de sa mère Dolorès et rencontre en chemin un autre fils dudit Pedro qui l’accompagne jusqu’à la ville. Et lui annonce la mort de Pedro. La ville parait complètement abandonnée. Et pourtant, Juan s’aventure dans la ville et cherche Ña Eduviges pour se loger. Et c’est là qu’on perd pied pour se laisser entraîner dans une sarabande où les morts de la ville nous informent sur leur passé, surtout celui de Pedro Paramo. Petite frappe devenu propriétaire terrien, tyran local à qui rien ni personne ne résiste, on le découvre par fragments, sans chronologie, par ouï-dire. Terres isolées, brûlées par la chaleur, la loi du plus fort et les passions violentes abritent cette histoire brillante et étonnante. La tension monte autour de Juan et des souvenirs de son père Pedro jusqu’au moment de bascule. De même, la situation de Pedro évolue avec l’amour de Susana et sa disparition… Je comprends mieux pourquoi ce roman est un précurseur du réalisme magique et a inspiré Garcia Marquez. Il nous plonge dans un Comala fantastique, où vivants et morts se mélangent, où la mort est omniprésente, banale, mêlée à la vie - renforçant l’image d’Epinal que j’ai du Mexique et des liens entre morts et vivants. Ça me fait aussi penser aux transis de pierre de la Renaissance, où le vivant est déjà rongé par la mort. Je suis complètement sous le charme.