C'est peut-être le texte le plus émouvant écrit par Irène Némirovsky parce qu'on devine qu'il est peu romancé. Et néanmoins les ressorts comiques sont multiples (je ne m'en souvenais pas).
On aurait pu le croire inadaptable au théâtre puisqu'il comporte une quarantaine de rôles. C'était sans compter sur la détermination de Virginie Lemoine et de Stéphane Laporte qui ont admirablement adapté ce roman, comme ils l'avaient fait avec le précédent.
C'était sans compter aussi avec le talent de Franck Desmedt qui passe d'un personnage à l'autre en une fraction de seconde. Il est époustouflant. On a le sentiment que les 39 personnages sont tous sur scène au même moment ... même le chat.
Nous sommes en juin 1940 avec lui (avec eux) sur la route de l'exode et pour ma part il étaient bien plus nombreux encore car se sont joints ma grand-mère, mon grand-père, ma mère, mon arrière grand-mère, leur carriole tirée par leur cheval infatigable. Ne manquait que le chien qui s'était donné pour mission (pleinement réussie) de défendre la maison éventrée par les bombes (mes grands-parents habitaient tout près de la gare de Soissons) où nous pûmes beaucoup plus tard récupérer mobilier, vaisselle et autres effets qu'il n'aurait pas raisonnable d'emporter pendant la fuite.
Ce que nous donne à voir Franck Desmedt (Molière du comédien l'année dernière pour son second rôle dans Adieu Monsieur Haffmann) est prodigieux puisqu'il rend parfaitement le caractère de chacun des personnages, lâche ou courageux, simple ou extravagant, homme, femme ou enfant, jeune ou vieux ... et même tous les autres qui ont été pris dans cette tourmente. Chacun son désastre.
Ce qu'il nous donne à entendre est aussi savoureux et situe l'âge des personnages, sans oublier la radio. Son affirmation "je ne peux pas y croire" est très drôle. Qui s'attendait à rire dans un tel contexte ? C'est une des qualités du spectacle et la tragédie ne perd pas de force car on sait combien elle fut réelle. La plume de l'auteure est sans concession et raille nos comportements. c'est vrai, à bien y réfléchir, qu'il est peut-être stupide d'habiller des morts ... destinés à pourrir sous la terre.
C'est peut-être cet imperméable et la coupe de cheveux, ou parfois la diction, qui font penser à Francis Huster, avec quelques années de moins et un talent augmenté.
J'ajoute que les lumières sont extraordinaires pour sculpter les atmosphères et la musique a été composée "sur mesure" si je puis me permettre.
Tempête en juin, d'après le roman d'Irène NémirovskyAdaptation Virginie Lemoine et Stéphane LaporteMise en scène Virginie Lemoine et Stéphane LaporteAvec Franck DesmedtLumières Denis KoranskyMusique Stéphane Corbin - Création Sonore Vincent LustaudA partir du 10 septembre 2019Du mardi au samedi à 19h00 et matinée le samedi à 15h00Au Théâtre La Bruyère - 5 rue La bruyère - 75009 Paris
Suite française, d'après le roman d'Irène NémirovskyAdaptation Virginie Lemoine et Stéphane LaporteMise en scène Virginie LemoineAvec Florence Pernel, Béatrice Agenin, Guilaine Londez, Samuel Glaumé, Emmanuelle Bougerol, Cédric revolons ou Gaétan BorgLumières Denis KoranskyMusique Stéphane Corbin - Création Sonore Vincent LustaudA partir du 10 septembre 2019Du mardi au samedi à 21h00 et matinée le samedi à 16h45Au Théâtre La Bruyère - 5 rue La bruyère - 75009 Paris